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M?tamorphie 1. Les vacances Par Forestier Enfin! Le dernier jour avant les vacances. Et quelles vacances! R?ma ?tait certain que sa copine appr?cierait ce qu'il avait secr?tement pr?par? pour elle; apr?s tout, au prix qu'il avait pay?, elle ?tait mieux d'appr?cier! Comme la translation devait avoir lieu en milieu d'apr?s-midi, de mani?re ? profiter du souper ? l'h?tel en d?pit du d?calage horaire, R?ma quitta le travail plus t?t que de coutume. Vers 14 heures, il mit fin ? sa derni?re consultation. Par chance, il n'avait pas cours cet apr?s-midi-l?. Le centre de translation ?tant situ? dans une autre zone, il devait prendre le temps de s'y rendre. Il avait peu de bagages, les m?tamorphoses qu'il avait command?es ?tant accompagn?es de tous les v?tements et accessoires n?cessaires. Il quitta donc bient?t son travail et salua ses coll?gues. Un ami l'accompagna dans le vestibule, comme il ?tait coutume, de mani?re ? l'aider avec ses sacoches. C'?tait toujours plus facile de les ajuster ainsi. R?ma n'avait jamais pu appr?cier la d?sorientation qui accompagnait chaque m?ta, m?me s'il devait s'y r?signer au moins deux fois par jour, pour quitter la maison et y revenir. L'agglom?ration n'?tait plus du tout comme les villes du XXe si?cle: elle comptait plut?t de nombreux petits villages entrecoup?s de zones plus sauvages. Les distances ?taient grandes, et les automobiles polluantes avaient disparu. Il salua son coll?gue, appuya ses mains contre la rambarde, se concentra et... laissa tomber ses sabots avant sur le sol. La forme alternative de R?ma, comme pour beaucoup de gens dans cette r?gion temp?r?e, ?tait inspir?e du cheval: quatre pattes munies de sabot, une peau recouverte d'une toison courte, un queue poilue... et une t?te mi-humaine, mi-chevaline, o? l'on reconnaissait bien l'homme que le cheval ?tait au fond, mais avec un nez permettant d'alimenter en oxyg?ne tous ces muscles. Ainsi qu'un p?nis dans son ?tui et qu'un scrotum ? l'air libre. Les m?tamorphoses respectaient toujours le sexe du titulaire de la forme alternative. C'?tait la loi. Dans le pass?, on avait permis les sexomorphoses, mais cela ayant entra?n? trop de troubles -- de nombreux hommes en profitant pour espionner des femmes -- la loi les avait r?serv?es au cas psychologiquement justifi?s. Bien s?r, le ?cheval? que R?ma devenait ?tait bien plus petit et l?ger que les anciens chevaux. La m?tamorphose changeait la forme, elle ne pouvait pas cr?er de la nouvelle mati?re vivante. Une fois ses sacoches sangl?es, R?ma partit au trot, puis galopa un peu. Il aimait ?norm?ment trotter et galoper. C'?tait tellement plus facile et tellement moins fatigant que de courir sous forme humaine. Ce corps ?tait fait pour la course! Et le plus beau: l'exercice qu'il prenait sous son apparence ?quine permettait m?me ? son corps humain de garder sa forme! Galoper ? travers la plaine et la for?t! Sentir le vent sur son corps, le sol sous ses sabots! R?ma se demandait comment les gens vivaient avant la mise au point des cristaux de m?tamorphose. On ressentait tellement de plaisir sous sa forme alternative. Bien s?r, on continuait de faire l'amour sous forme humaine -- R?ma anticipait ses vacances avec Nati, et son p?nis commen?a ? sortir de son ?tui. Bien que... Avec qui c'?tait d?j?? Ah oui, il se souvenait. Il avait quelquefois ?sailli? une copine. Pass? le plaisir de la nouveaut?, c'?tait somme toute assez d?cevant. Tout ce poil constituait une barri?re ? la fusion des corps, et une seule position ?tait possible. N?anmoins, tout le monde l'avait essay? au moins une fois... Apr?s environ une demi-heure, R?ma arriva au centre de translation. Il haletait. Nati l'attendait depuis d?j? quelques minutes. Pour l'accueillir, elle avait gard? sa forme chevaline. Les deux hybrides s'embrass?rent sur la bouche puis se poursuivirent bient?t pendant quelques minutes. Leur couple battait de l'aile depuis quelque temps, mais la perspective de vacances, de m?me que la surprise, enchantait aussi Nati. R?ma ?tait fier de son coup. Mais il fallait partir, et chacun reprit sa forme humaine, apr?s avoir appuy? ses sabots contre la rambarde. Dans cette direction, ce n'?tait pas n?cessaire, mais quand m?me moins inconvenant que de se retrouver ? quatre pattes. Enfin, les amants purent s'?treindre. Nati ?tait tout excit?e: elle ne savait pas o? R?ma l'emmenait. -- Tu ne veux pas me le dire, maintenant, demanda-t-elle? -- Disons que c'est un centre de vacances... un centre de m?tamorphie, bien s?r... avec quelques avantages. Mais je ne veux pas t'en dire plus pour le moment. -- Dans quoi m'as-tu encore embarqu?e? -- Je ne ?t'embarque? dans rien. Je travaille notre couple, c'est tout, r?pondit R?ma. Viens, on nous attend. Ils p?n?tr?rent dans le b?timent, r?cup?r?rent leurs bagages et s'avanc?rent vers le comptoir. R?ma communiqua son ordre de voyage, et le commis les invita ? entrer dans la cabine de translation. -- Vous partez en vacances? -- Oui, pour une d?cade, r?pondit R?ma. -- Un centre de m?tamorphie? R?ma acquies?a apr?s une br?ve h?sitation. -- Je suis en train d'?conomiser pour y aller avec mon groupe conjugal. On a h?te. En tout cas, je vous souhaite de belles vacances. -- Oh, elles le seront, j'en suis s?r. Sur ce, le commis referma la porte derri?re lui. Un sentiment de claustrophobie s'imposa aux deux voyageurs, mais ce fut bref. Il fut suivi par un sentiment de d?sorientation, puis un haut-le- c?ur, et... ding! Une sonnette annon?a leur arriv?e. Le commis du centre de vacances leur ouvrit la porte. -- Bienvenue au Centre marin du golfe Saint-Martin. Madame, monsieur. Nous vous attendions. Je vous invite ? aller jeter un coup d'?il ? la verri?re pendant que nous monterons vos bagages. Par ici. Le souper sera servi dans une heure. La verri?re donnait sur la mer, et le soleil se couchait d?j?. Nati se rendit compte qu'ils se trouvaient bien plus au nord. Ce n'?tait que la fin de l'?t? chez eux, mais il y avait d?j? de la neige par ici. Elle ?tait encore plus excit?e; elle se rendait compte que R?ma l'avait ?cout?e quand elle avait ?mis le souhait de nager -- sous une forme alternative, bien entendu -- dans une mer froide. Cela l'avait toujours fascin?e. Ce devait ?tre sa surprise. Surtout que ?a n'emballait pas du tout R?ma. Mais R?ma lui effleura bient?t le bras. -- Tu sembles heureuse ? l'id?e d'aller nager. Nous pourrons y aller demain. Mais ce n'est pas mon seul cadeau. -- Quoi d'autre alors? -- Eh bien, comme j'avais commenc? ? te le dire, ce centre est un centre... o? l'on tol?re certaines choses. Nati rougit. -- Je sais que tu tiens ? m'?tre fid?le, mais que tu aimerais bien coucher aussi avec des femmes, reprit R?ma. J'ai d?cid? de faire d'une pierre deux coups. Je ne sais comment je vais m'en tirer, mais je me suis command? une forme alternative f?minine. -- Pour vrai? Nati ?tait d?contenanc?e. Mais c'est ill?gal. Ce n'est pas dangereux? -- Pas du tout. Ces activit?s sont tol?r?es. Tu sais, il y a toujours eu des choses officiellement ill?gales mais tol?r?es dans certaines limites. La direction de l'h?tel m'a assur? qu'ils n'avaient jamais eu de probl?me avec la police. Alors, qu'est-ce que tu veux? Je me transforme tout de suite ou plus tard? Nati r?fl?chit quelques instants, puis r?pondit: -- Attends un peu. Et ils mont?rent dans la chambre. R?ma aurait bien voulu attendre encore un peu, tellement il appr?hendait la perspective de la sexomorphose, mais d?s le souper termin?, Nati lui rappela sa promesse. Elle l'accompagna donc alors qu'il se dirigeait vers le comptoir d'accueil. -- Bien mang?, madame, monsieur? -- Fantastique, r?pondit R?ma. C'?tait une nourriture chaleureuse. On voit que nous sommes dans un climat froid et que le chef a su adapter sa cuisine. -- Je suis heureux que vous appr?ciiez. Je lui communiquerai le compliment. Alors, comment puis-je vous aider? -- Vous savez, h?sita-t-il, quand j'ai r?serv?, on m'a parl? de certains services, comment dire? compl?mentaires. -- Je ne comprends pas, monsieur. -- Justement, r?torqua R?ma. J'aimerais bien laisser tomber le monsieur pour la dur?e de mon s?jour. -- Plait-il? R?ma regarda ? droite, ? gauche, et se pencha vers le concierge. -- Je voudrais... changer de sexe. C'est pour faire plaisir ? ma compagne, ajouta R?ma en un seul souffle. Le concierge parut un peu surpris, et regarda Nati, qui acquies?a en souriant. Il revint ? R?ma, le regarda quelques secondes, puis conclut: -- Si vous voulez vous donner la peine. C'est par ici. Rendus dans une autre pi?ce, il demande ? R?ma son poids, puis s'il avait des pr?f?rences. -- N... non, r?pondit-il apr?s une h?sitation. Je laisse cela ? votre discr?tion. -- Et vous, madame? -- Moi? Je reste telle que je suis. -- Fort bien. Cependant, j'aimerais savoir si vous, vous avez des pr?f?rences quant ? la forme qu'empruntera votre compagnon. -- Y a-t-il un catalogue? -- Tout ? fait. Sur cet ?cran. R?ma, de plus en plus nerveux, ne cessait de se tortiller sur son si?ge pendant que Nati devisait avec le concierge, commentant les images des mod?les f?minins disponibles. Finalement, les deux se mirent d'accord. -- Monsieur, reprit le concierge avec le sourire, je vais proc?der ? la transformation. Vos formes de base et alternatives seront stock?es dans notre banque pour la dur?e de l'emprunt. Vous avez une copie de sauvegarde, n'est-ce pas? -- Euh... bien entendu. On en a tous. -- ? la bonne heure. Comme ?a, il n'y aura aucun danger pour vous. N'oubliez pas qu'il vous est fortement d?conseill? de quitter le domaine de notre centre sous votre apparence d'emprunt. Cela pourrait avoir de funestes cons?quences, tant pour vous que pour nous. Vous me comprenez? -- Euh... je crois. Enfin, oui. Oui, je comprends. -- Tr?s bien. D?tendez-vous. Voil?, la copie est termin?e. On y va? -- Bien, on y va, r?pondit R?ma en soupirant. Et il se transforma. Il ?tait un peu plus grand qu'avant, et avait bien dix centim?tres de plus que Nati. La couleur des cheveux n'avait pas chang?, ni celle de la peau ou des yeux, Nati ayant choisi un mod?le qui lui rappellerait son R?ma. La nouvelle R?ma portait la m?me tunique qu'auparavant, mais ?tait constitu?e de tissu intelligent, elle s'?tait adapt?e ? ses nouvelles formes. Le concierge sourit quand il vit R?ma, comme tous les hommes sexomorph?s, se diriger d'un pas incertain vers le miroir, toucher son visage imberbe, puis abaisser ses mains vers ses seins, les prendre en coupe d'un air surpris, puis, apr?s quelques secondes d'?tonnement, abaisser ses mains vers son pubis, prendre un air l?g?rement d??u d'avoir ?perdu? son p?nis et ses testicules, puis remonter ses mains ?baladeuses? vers ses hanches, puis vers ses fesses, qu'il -- pardon: qu'elle -- tenta de mieux voir en se tordant le cou. -- Comment tu me trouves, Nati? Il ?tait ?tonn? par sa voix. -- Parfaite. Tr?s bien. C'est un tr?s beau cadeau que tu me fais l?, R?ma. Et maintenant, si on allait danser? Ne veux-tu pas essayer ton nouveau corps, ma grande? -- Euh... bien s?r. Ils pass?rent donc une bonne partie de la nuit ? danser, d?calage horaire aidant. R?ma fut surpris-- enfin, surprise, la premi?re fois qu'un homme l'invita, mais elle se ressaisit vite, encourag?e par sa compagne, elle aussi invit?e. Ils dans?rent cependant ensemble toutes les danses ne recourant pas aux vieux r?les sexuels. Tard dans la nuit, ?puis?s, ils s'?croul?rent dans les bras l'un de l'autre et dans leur lit. Le lendemain matin, R?ma se r?veilla en panique: sa vessie r?clamait son attention, mais quelque chose n'allait pas. Et ce tiraillement sur sa poitrine! Tr?s vite, il reprit ses esprits, se rappela o? et ce qu'il ?tait et tenta se sortir du lit sans r?veiller Nati. Elle alla ?s'accroupir? dans la salle de bains, et fit comme elle appris la veille. Retournant vers le lit, elle ne put s'emp?cher, malgr? l'air frisquet de la chambre, de s'arr?ter devant le grand miroir en pied et de contempler sa nudit?. Nati avait fait un bon choix, et il comprenait qu'on l'ait invit?e ? danser la veille: il aurait fait la m?me chose. N?anmoins, m?me s'il ?tait habitu? aux m?tamorphoses, il ne pouvait s'emp?cher de penser qu'il avait subi l? une transformation ?essentielle? de son ?tre, et ne pouvait s'emp?cher de poser sa main sur son pubis si ?trangement vide, tout en ressentant l?g?rement une dr?le de sensation juste derri?re, ?? l'int?rieur?. -- Je peux regarder moi aussi? R?ma sursauta. C'?tait Nati. -- Bien s?r, ma ch?rie. Ce corps t'appartient; c'est d'ailleurs toi qui l'as choisi. J'esp?re que tu en es satisfaite. -- Vu d'ici, tout me semble parfait. Pourrais-tu commander le d?jeuner - - et passer une robe -- pendant que je fais ? mon tour un brin de toilette? -- ? vos ordres, madame! Elles avaient dormi longtemps et, compte tenu de la saison et de la faible dur?e des jours, il ?tait trop tard pour partir nager dans la mer sous une forme animale. Elles d?cid?rent donc d'utiliser les services du centre de vill?giature ?? l'ancienne?. Nati entraina R?ma prendre du soleil nues dans une section de la verri?re, section munie de miroirs pour amplifier la faible lumi?re du nord, dans le bain tourbillon, pour une s?ance de massage-d?tente. R?ma ?tait toujours entour?e de magnifiques femmes, toujours dans cet ?trange corps d'emprunt, mais Nati lui avait demand? de fermer les yeux pour ?tre plus pr?sente ? son corps, pour mieux vivre cette exp?rience. Cela marcha. Nait ?tant bisexuelle, R?ma ne fut pas surprise quand elle l'entra?na dans leur chambre en fin d'apr?s-midi. Toutes les activit?s de la journ?e ayant ?t? si agr?ables, il ?tait presque normal que du sexe y fasse suite. -- Ma grande, dit Nati, c'est de nouveau ta premi?re fois, pourrait-on dire. Laisse-moi te guider. Tu vas voir, faire l'amour entre femmes est tr?s diff?rent de ce qui se passe habituellement entre nous deux. C'est... comment dire... une looooongue s?ance de pr?liminaires. -- C'est tout? Juste des pr?liminaires? -- Tu vas voir. Et elle l'embrassa, d'abord sur la bouche, puis un peu partout sur le corps. R?ma avait un vrai corps de femme. Toute sa peau ?tait satin?e et sensible. Bien qu'il aim?t, en tant qu'homme, se pelotonner contre sa compagne, il ne comprenait qu'alors combien le corps f?minin pouvait vivre diff?remment les carresses. Il sentait confus?ment son sexe se d?tendre, mais sans exiger quoi que ce soit -- et c'?tait bien ainsi, parce que l'id?e d'?tre ?p?n?tr?e? l'?c?urait un peu. Bien s?r, bient?t, il entreprit de caresser Nati, mais celle-ci pr?f?ra se concentrer sur sa nouvelle compagne. Les tentatives de R?ma cess?rent tout ? fait quand Nati commen?a ? mordiller et ? embrasser son clitoris. R?ma ressentait un plaisir inconnu qui la laissait sans force, et ce, sans m?me que Nati ait besoin de la faire ?basculer? dans l'orgasme. C'?tait sublime. Et interminable. Elles s'endormirent finalement dans les bras l'une de l'autre ? la lumi?re des ?toiles dans la nuit d'hiver. Tr?s t?t le lendemain matin, apr?s un copieux petit d?jeuner, elles se pr?sent?rent dans la salle de m?tamorphose marine. R?ma planait encore; une chance que Nati ?tait l? pour prendre les choses en main. -- Alors, leur expliqua la responsable, la forme alternative que nous vous avons fournie est le best-seller de notre centre. C'est une forme inspir?e du phoque, ou plut?t de l'otarie. Vous pourrez donc marcher avec suffisamment de facilit?, tout en ?tait tout ? fait ? l'aise dans l'eau. Il s'agit d'un carnivore tout ?quip?. Par cons?quent, lors de longs s?jours, vous pourrez vous repa?tre de poissons. Crus, bien s?r. Vous aimez le sushi, j'esp?re. En tout cas, vous l'aimerez. -- Et pourquoi pas une sir?ne? demanda Nati? Ou un dauphin? -- Une sir?ne? Eh bien, dans ces eaux, elle mourrait de froid en quelques minutes. Et m?me dans des eaux plus chaudes, elle n'aurait rien ? se mettre sous la dent, elle serait myope sous l'eau et ses mains seraient tout ? fait inutiles ? la nage. Sans oublier que sa peau se plisserait bient?t. Pour rendre cette forme utilisable, il faudrait tellement la modifier qu'on se retrouverait plus ou moins avec ceci. -- Et un dauphin, alors? reprit Nati. -- C'est possible, mais tout ? fait d?conseill? aux d?butants. D'abord, il faut qu'il reste toujours dans l'eau, ce que tout le monde n'aime pas. On ne dort que par p?riodes de quelques minutes. Et comme le dauphin ?voit? avant tout avec son sonar, le monde dans lequel il vit est tout ? fait ?tourdissant. Mais si vous revenez un jour, on pourrait consid?rer cette forme. -- Tr?s bien. -- Alors, pr?tes, mesdames? Elles acquiesc?rent. -- D?shabillez-vous et entrez dans l'eau. Cette forme est munie d'une s?curit?: on ne peut y acc?der qu'au contact de l'eau, et on ne peut en revenir qu'au contact du sol. Vous y ?tes. Quand vous serez transform?es, promenez-vous d'abord un peu sur la terre ferme, puis nagez quelques minutes dans le bassin. Vous pourrez aller ensuite dans l'eau libre. S'il y a un probl?me, utilisez votre communicateur. Quelle transformation bizarre! Sous forme otarine, R?ma et Nati rampaient autant qu'ils marchaient. Mais, dans l'eau, quelle efficacit?! On pouvait rester plusieurs minutes d'affil?e sans respirer et sans se sentir oppress?. Elles avaient d'abord l'intention de se chauffer au soleil -- par moins cinq degr?s! -- mais le temps s'?tant ennuag? et s'?tant mis ? la neige, elles nag?rent plusieurs heures l'une autour de l'autre, en se carressant parfois avec les nageoires ou en entrefrottant leurs corps dodus. Elles mang?rent m?me quelques poissons en guise de d?ner. La d?cade se passa ainsi: nage dans l'oc?an, bains de soleil dehors ou dans le solarium, soupers gastronomiques et danses, m?me une nuit ? la belle ?toile, sous forme otarine. Et beaucoup de c?lins. Malgr? les orgasmes qu'elle avait, R?ma sentait cro?tre en elle, ou en lui sans doute, un sentiment de frustration. C'?tait bien beau, ces carresses et ces cunnilingus, mais il voulait ?baiser? sa Nati. La baiser comme un homme, comme il avait toujours fait l'amour et comme il ne pouvait s'emp?cher de le fantasmer. Heureusement, la d?cade achevait et il devrait bient?t retrouver son corps. Il comptait bien se reprendre d?s le dernier jour. Ce jour n'arriva pas. Au neuvi?me jour, alors que tous les clients d?jeunaient (ou fol?traient au lit), la police investit les lieux. Ils scannaient tout le monde. -- Alors... R?ma, dit le policier en lisant son appareil, ?madame? R?ma, je dois vous mettre en ?tat d'arrestation pour sexomorphie non autoris?e. On peut enfin faire le m?nage. Les policiers menott?rent R?ma puis l'emmen?rent, via une cabine de translation, dans une petite salle d'o? ils la conduisirent dans une petite cellule, dont ils ferm?rent la porte. -- Un avocat viendra vous voir dans quelques heures. R?ma se mit ? pleurer. 2. La prison L'attente me parut longue. Toutes mes fonctions de communication avaient ?t? mises hors service, de telle sorte que je ne pouvais rien lire, rien ?couter, rien regarder. Je ne savais m?me pas quelle heure il pouvait bien ?tre. On m'avait apport? un repas et je m'?tais ensuite assoupie. Bien entendu, mes fonctions de m?tamorphose avaient aussi ?t? mises en veilleuse, et je devais demeurer la femme que j'?tais lors de mon arrestation. Ce qui d?j? suffisant ? me d?primer... Quoi qu'il en soit, l'avocate arriva bient?t. Je fus ?tonn?e quand elle entra dans ma cellule. -- Les ?changes avec les avocats ne se font-ils pas par ?cran, lui demandai-je? -- J'ai lu votre dossier, me r?pondit-elle, et rien ne semble s'opposer ? une rencontre physique. De plus, entre femmes, les risques sont moins grands. Elle retournait le fer dans la plaie, et elle le savait. -- Donc, reprit-elle, j'aurais besoin de savoir tout ce qui vous amen?e ? accomplir cette m?tamorphose ill?gale. Je vous conseille de tout me dire d?s maintenant, car, lors du proc?s, vous ne pourrez pas ?luder les questions. Si vous me mentez maintenant, mon travail sera moins efficace. Je lui racontai donc toute mon histoire. Elle remarqua avec satisfaction que je m'?tais m?tamorphos?e avant tout pour faire plaisir ? ma copine, et non pas pour satisfaire quelque vice personnel. -- Je ne peux rien vous promettre, bien entendu, conclut-elle, mais j'ai l'intuition que vous vous en tirerez avec une sentence minimale. Cela sera surement une incarc?ration, mais relativement courte. Vous serez libre dans quelques semaines. Quelques semaines! Et quoi encore? Je dois imm?diatement reprendre mon poste au centre d'?ducation; sinon, je risque de le perdre. Et tout le travail que j'aurai fait pour ?picer ma relation avec Nati aura ?t? vain. J'oscillais entre la col?re et la tristesse! Damn?es hormones! Le proc?s eut lieu quelques heures plus tard, dans ce qui ?tait, finalement, l'apr?s-midi du jour suivant mon arrestation. Dans les romans historiques, on parle des semaines ou des mois qui s'?coulaient autrefois avant un proc?s. C'est difficile ? croire. Comment rendre justice dans de telles circonstances? D'autant plus, semble-t-il, que les accus?s ?taient souvent d?clar?s non coupables! Apr?s des mois de d?tention. Je suis amen?e, menott?e, dans la salle d'audience, devant les deux avocats et l'avocat-juge. On me mit sur la t?te, comme dans les films, un genre de couronne m'emp?chant de mentir. Un grand calme m'envahit sur-le-champ. Les menottes ne me tourmentaient plus, ni mes seins ou l'absence de mon p?nis. Les trois personnes devant moi ?taient mes amis, mes confidents, et nous allions r?gler tous ensemble un probl?me moral que j'affrontais. Je ne ressentis ni honte ni col?re quand l'avocat de la poursuite relut l'acte d'accusation. Et je r?pondis avec gentillesse et application ? toutes les questions qu'il me posa, ainsi que l'avocat-juge. Le proc?s ressemblait ? une conversation, ? un s?minaire o? il s'agit de r?gler un probl?me entre amis. Je restai dans le m?me ?tat alors que mon avocate s'entretenait avec ses deux coll?gues derri?re un ?cran de silence. La sentence serait rendue ?sur le banc?, je le savais, mais je ne m'en souciais pas. Je fus condamn?e ? une peine de sept ? neuf d?cades de r?gime num?ro huit. J'ignorais ce dont il s'agissait. Ainsi qu'? vingt ans de stabilit?. Je ne savais pas non plus ce que cela voulait dire. Maintenant sous l'effet d'une drogue qu'on m'avait inject?e, je me laissais faire alors que l'on m'amenait dans une autre salle, qu'on me d?shabillait, qu'on me mettait de nouvelles menottes et qu'on appliquait une dr?le de substance entre mes jambes. Je me laissais conduire dans une nouvelle cellule, dont les murs semblaient faits de pierres, comme dans les films se passant au Moyen ?ge, mais avec quatre miroirs bizarres sur les murs. Il n'y avait pas de lit; je m'endormis sur le sol. J'ai appris ce que c'est, le r?gime num?ro huit. Mes fonctions de communication ont ?t? partiellement r?tablies, mais je ne peux que lire ou ?couter des essais traitant de mon cas. C'est la nouvelle doctrine judiciaire. Un proc?s rapide, une peine courte, mais intense. Comme je pouvais le dire: ?Le but des peines intenses est de faire prendre rapidement conscience au d?tenu de son ?tat et de la n?cessit? de la punition. Le rappel de peines anciennes et les entraves physiques sont des moyens utilis?s dans ce but. On utilisera aussi tous les moyens permettant de rappeler au d?tenu la nature et/ou les cons?quences de sa faute.? Ma premi?re impression avait ?t? exacte, malgr? la drogue qui inhibait mes sentiments. Le r?gime num?ro huit rappelait le Moyen ?ge. D'o? les murs ? l'aspect de pierres, d'o? mes entraves: des chaines reliaient mon cou, mes poignets et mes chevilles. Des anneaux elliptiques faits ? ma taille y ?taient attach?s. Je devais marcher avec les poignets devant mon abdomen, une chaine entre les seins et devant mon pubis plat, et en entendant toujours un bruit infernal. Non que je marchasse beaucoup. Je passai les premi?res journ?es prostr?es dans un coin, en essayant de ne pas regarder dans les miroirs. Ah oui! Les miroirs! Les miroirs et la stabilit?! ?La stabilit? consiste en l'interdiction d'utiliser la m?tamorphose durant une p?riode donn?e. Elle est prononc?e pour des usages ill?gaux de la m?tamorphose.? Vingt ans ? ?tre une femme. Le cinqui?me de ma vie, mais, ? cet ?ge, c'?tait une vie ruin?e qui s'?tendait devant moi. Et ces satan?s champs inverseurs me le rappelaient toujours: chacun d'entre eux me renvoyait une image de moi-m?me sur un angle diff?rent. Je me voyais de face, de profil, de dos, toujours nue, des seins, des fesses, des hanches, un pubis vide, toujours aussi f?minine, toujours aussi sexy, mais plus pour moi! Je devais ?tre punie par o? j'avais p?ch?. Accroupie dans un coin, les mouvements limit?s par mes chaines, mes pens?es vagabond?rent bient?t vers ma derni?re semaine de libert?, avec Nati. Ma main droite se dirigea d'elle-m?me vers mon clitoris -- et, croyez-moi, pour le plaisir, un clitoris vaut bien un p?nis. Je commen?ai bien vite ? me masturber... ou plut?t ? tenter de me masturber, parce que, quelques soient les efforts que j'y mettais, je ne ressentais rien. Merde! C'?tait ?a, la cr?me bizarre. ?Toute activit? sexuelle est interdite lors d'une peine intense. Cette privation fait partie de la peine.? Ce soir-l?, frustr?e en col?rique, je m'endormis difficilement sur le sol, qui me semblait plus dur que la veille. Comme je n'avais rien d'autre ? faire et que l'oisivet? ?tait insupportable -- mais comment faisaient-ils pour ne pas devenir fous au Moyen ?ge? -- je finis par parcourir les textes qu'on m'autorisait ? lire. Des ?thiciens d?fendaient l'interdiction de la m?tamorphose sexuelle, et mon sens logique ne pouvait que les approuver. On me proposait des exercices physiques adapt?s ? ma situation: d?j? marcher en portant les chaines, faites volontairement plus lourdes qu'il n'?tait n?cessaire, constituait un exercice suffisant. Il fallait que je marche, il fallait que je lise et que j'?coute ces essais, il fallait que je prenne soin de moi-m?me, il fallait que j'accepte l'image que me renvoyaient les champs inverseurs, car on jugeait ainsi de mon progr?s, et un progr?s rapide amenait une peine plus courte. Alors, donc, durant des jours qui me semblaient tous interminablement semblables, je marchai dans ma cellule, accomplissant ? m'en saouler les exercices possibles dans mes entraves. Puis, assise ou couch?e, je lisais ou j'?coutais les ?l?ments de connaissance qui m'?taient permis: c'?tait de la philosophie du droit, mais aussi de l'histoire, entre autres celle de la m?tamorphose et m?me de la condition f?minine. J'appris que, quant ? devenir une femme, j'?tais chanceux -- ou chanceuse -- de vivre ? mon ?poque. C'?tait toujours ?a de gagn?. Je me regardais aussi dans le miroir, essayant de faire comme j'avais vu Nati. Puis je reprenais les exercices, seule mani?re de gagner un sommeil que j'esp?rais sans r?ve, mais qui l'?tait rarement. En effet, des r?ves ?rotiques me poursuivaient, dans lesquels j'?tais tant?t un homme, tant?t une femme, tant?t un hybride incompr?hensible, et m?me parfois ? la fois homme et femme. Ces matins-l?, je me r?veillais toujours plus frustr?e. Les pires moments, mais aussi, paradoxalement, les meilleurs, ?taient ceux durant lesquels je me permettaient de r?vasser, visitant mon pass? et envisageant mon avenir, avec malgr? tout un peu d'espoir. Bien s?r, les murs de pierre et les entraves me limitaient toujours, je devais toujours m'accroupir pour manger, et j'?tais toujours aussi frustr?e, mais je commen?ais ? me faire ? mon apparence, ? mon sexe, je commen?ais ? accepter la justice de ma peine, je commen?ais aussi ? en voir la fin. Je ressentis tout de m?me un choc, voire un vertige quand des gardiennes m'emmen?rent hors de ma cellule pour me d?barrasser de mes entraves, me laisser prendre une vraie douche, m'enduire la vulve d'une autre cr?me - - ?Les sensations normales reviendront dans quelques heures? -- me donner des v?tements et m'emmener dans la salle de translation. Les v?tements ?taient nouveaux pour moi: un pantalon serr?, alors que j'avais toujours port? des tuniques, bien plus confortables pour un homme, un t-shirt ajust?, qui mettait ma poitrine bien ? la vue de tous, et des bottes et un manteau ? capuche, parce que l'hiver ?tait arriv?. En me voyant dans le miroir ainsi habill?e, je vis enfin une vraie femme, comme j'en avais vu tous les jours de ma vie, et le choc fut tellement grand que je dus m'asseoir. Peu apr?s, mes fonctions de communication se r?veill?rent d'un coup et je fus comme assomm?e par la masse des messages auxquels r?pondre. Heureusement, mon secr?taire virtuel prit bient?t soin d'accomplir un tri drastique. Il me resta deux messages incontournables: comme pr?vu, j'avais perdu ma place, et Nati m'annon?ait qu'elle ?tait en chemin pour venir me prendre ? la salle de translation. Elle n'avait fait que quelques jours de prison, pour jouissance non coupable d'un acte criminel mineur. Je m'appr?tais ? lui r?pondre que je pourrais bien galoper jusqu'? la maison quand je me souvins: je n'avais que ces deux jambes pour marcher. Plus de galop, ni m?me de trot. Je soupirai. Au bout d'un moment, je me sentis assez forte pour aller rejoindre Nati. Je me translatai. Comme de raison, elle m'attendait dans la salle d'accueil, sous sa forme humaine. Comme elle ne bougeait pas, sans doute parce qu'elle ignorait dans quel ?tait d'esprit je pouvais bien me trouver, ce fut moi qui dus aller vers elle. Ce fut difficile, comme si je sentais encore mes entraves, encore plus lourdes et restrictives qu'auparavant. C'est quand je fus pr?s d'elle que le barrage de mes ?motions s'?croula et que je mis ? pleurer dans ses bras ? chaudes larmes. Contrairement ? ce qu'un homme aurait fait -- ? ce que j'aurais fait, sans doute -- elle ne tenta pas de me consoler, mais pleura avec moi. Les commis du centre de translation, qui m'avaient reconnue, bien entendu, ?taient un peu mal ? l'aise devant ces effusions. Malgr? tout, je ne pus m'emp?cher de remarquer que j'avais rapetiss?. J'?tait maintenant plus petite que Nati, ce qui signifiait que j'avais bien perdu 15 cm. Comment cela? Myst?re. Apr?s quelques minutes, mes larmes cess?rent enfin. Comme je me sentais honteuse -- en fait, plus honteux qu'honteuse, si l'on peut dire -- je m'excusai aupr?s de Nati. -- Mais de quoi, me demanda-t-elle, ?tonn?e? -- Mais d'avoir pleur? devant tout le monde, r?pondis-je. -- Mais tu te sens mieux, maintenant, n'est-ce pas? -- M...ouais, dus-je reconnaitre. -- Alors, c'?tait bien et tu n'as pas ? t'excuser. ?Dans le fond, tu es toujours un homme ? l'int?rieur, ajouta-t-elle, pensant me taquiner. Cette remarque fit monter en moi une vague d'?motions contradictoires. J'aurais eu envie de pleurer, mais je n'avais plus de larmes. De la col?re vint donc se substituer ? la tristesse. Mais je tentai de la r?fr?ner: il n'aurait pas ?t? bon de marquer ses retrouvailles d'un ?clat. -- Partons, dis-je alors pour ?chapper ? la tension. J'ai h?te d'arriver. Mon ton ?tait peut-?tre un tantinet plus brusque qu'il n'aurait d?. ? ma d?charge, on conviendra que je ne savais pas encore moduler des ?motions dans ma nouvelle voix, ?motions qui m'envahissaient d'ailleurs plus qu'auparavant. -- Attends un instant. Je dois me m?tamorphoser. J'esp?re que tu ne m'en voudras pas. Pourquoi lui en voudrais-je? Par d?pit? Quand je sortis dehors avec Nati, je vis un sulky qui m'attendait, auquel ?tait d?j? attel? un m?tamorphos?. Alors que j'aidais Nati ? s'atteler, je reconnus mon voisin Richa. Nous nous salu?mes, mais il me faisait une dr?le d'impression. Je fis le trajet que je connaissais si bien emmitoufl?e dans mon manteau sous le clair soleil hivernal. Ainsi juch?e, tout me semblait diff?rent. Alors que j'approchais de la maison, je me demandais quelle vie je pourrais y connaitre. Pourrais-je vivre une relation uniquement lesbienne avec Nati? Cela me suffirait-il? Celui ?lui? suffirait-il? De quoi allais-je vivre? Que dirait ? mon propos la communaut?? Je sais qu'on est cens? accueillir un ex-d?tenu avec toute l'hospitalit? possible, mais est-il possible de surmonter sa propre honte? ? tout le moins, ces interrogations me furent ?pargn?es ce soir-l?. Nati m'avait pr?par? mes mets pr?f?r?s, mais ils attendirent. Mon corps s'?tait r?veill?, et je retrouvai le plaisir sexuel de notre d?cade maudite. Une femme ne peut ?tre r?ellement rassasi?e, et seul l'?puisement mit fin ? notre soir?e. Le lendemain matin, nous nous lev?mes tard. Nati m'annon?a qu'elle avait pris sa journ?e, et que nous allions aller magasiner. -- Il va falloir t'acheter des nouveaux v?tements. En plus, compte tenu des restrictions qui t'ont ?t? impos?es, Richa et moi, on a d?cid? qu'il te fallait une bicyclette. On ne pourra pas toujours ?tre l? pour te voyager, tu sais bien. -- Richa et toi? Nati eut l'air g?n?. -- Euh... On a pass? un peu de temps ensemble durant ton... ton absence. Il m'a beaucoup aid?e, tu sais. Tiens, je vais l'appeler pour lui dire qu'on part. La journ?e se passa bien. Une fois en ville, Richa partit travailler. Une fois le sulky vide, Nati pourrait le tirer toute seule. D'autant plus que R?ma n'allait pas tr?s vite en v?lo. C'est le soir, apr?s le souper, que le chat sortit du sac. J'?tais d?j? intrigu?e par le fait que Richa nous avait rejointes pour le souper, et que, d?s son arriv?e, une sorte de g?ne s'?tait install?e entre nous trois. -- R?ma, me dit Nati, l'air encore plus embarrass?e, je dois de t'avouer quelque chose. Je t'aime beaucoup et, pendant ton absence, je me sentais tr?s seule. Richa m'a beaucoup r?confort?e. Je commen?ais ? voir o? elle voulait en venir. -- Et nous nous sommes mis ensemble. Pardonne-moi, mais je ne savais pas trop ce que tu ?tais devenue, si tu voudrais toujours ?tre avec moi, maintenant que tu ?tait devenue une femme pour longtemps. Elle parlait de plus en plus vite. Je ne savais pas si tu m'en voudrais. Mais la v?rit?, c'est que j'?tais seule, j'avais froid, je m'ennuyais, ?a se voyait, et Richa a ?t? si gentil avec moi. Elle se mit ? pleurer. J'?clatai en larmes moi aussi. Richa prit Nati dans ses bras, et apr?s avoir pens? ? les rejoindre, je me pr?cipitai dans le lit pour pleurer toute seule. Apr?s quelques minutes -- mais peut-?tre n'?taient-ce que quelques secondes, je n'ai pas pens? ? consulter mon horloge interne -- Nati vit me rejoindre. Elle sanglotait encore. Nous me prit dans ses bras et nous pleur?mes ainsi quelque temps. C'?tait bien de pouvoir pleurer ensemble sans devoir se parler. Je lui en voulais, mais j'?tais aussi heureuse qu'elle f?t l? ? me consoler, et j'avais ? ce moment-l? plus peur de la perdre comme amie que comme amante. -- J'imagine que tu veux le lit pour toi et Richa, luis dis-je apr?s quelques minutes. -- C'est gentil ? toi de me le proposer. Je vais demander ? Richa de mettre tes affaires dans la chambre d'ami. Et sache que tu resteras toujours une amie pour toi. Les jours suivants furent ?tranges. Je me sentais mal ? l'aise. J'?tais sortie de prison, mais je me sentais toujours seule. Bien entendu, je passais mes journ?es ? me chercher du travail. Malgr? toute la sollicitude qu'on pouvait avoir dans mon patelin, on n'avait pas de poste pour moi. Les nuits, je les passais dans la chambre d'ami. Une fois, me sentant trop seule, j'?tais bien all?e rejoindre Nati et Richa, mais j'avais ? peine dormi. Je m'?tais fig?e d?s que Richa m'avait enlac?e et que j'avais senti son corps contre le mien et son sexe se dressant de lui- m?me entre mes cuisses. Je savais par exp?rience que c'?tait tout naturel, mais, dans mon esprit, le d?gout et m?me la peur eurent le dessus. N?anmoins, quand j'entendais Richa et Nati faire l'amour dans la chambre voisine, je ne pouvais m'emp?cher d'?prouver du d?sir et de me mettre ? la place de Nati. Je me masturbais souvent, mais, m?me si c'?tait agr?able, je restais prise avec un sentiment de vide. Je prenais mes seins dans mes mains et j'essayais de m'endormir en m'imaginant qu'on -- un homme? -- les caressait. Au bout de quelques semaines, je me d?cidai ? partir. J'aimais bien Nati, et m?me Richa, mais je ne pourrais jamais faire une nouvelle vie dans ces conditions. Je partis un matin de printemps, sur ma bicyclette, avec mes quelques v?tements, et me dirigeai vers le centre de translation. J'avais laiss? ? Nati un message retard?, quelle aurait d?s qu'elle reviendrait chez elle. J'allais en ville. Je savais que bien des gens n'y utilisaient jamais la m?tamorphose. Non seulement elle ?tait moins utile dans cet environnement, mais on comptait de nombreuses personnes qui la refusaient pour des raisons religieuses et qui s'y regroupaient. ?Tu garderas la forme que Dieu t'a donn?e? ?tait leur nouveau commandement. Je pourrais me fondre dans ce milieu. ?pilogue J'ai r?ussi ? refaire ma vie. Je travaille dans un centre d'?ducation, comme auparavant et, apr?s quelques exp?riences amoureuses avec des femmes, dont une qui a dur? plus de six mois, je me suis rendu compte que je n'?tais pas lesbienne. Le pas fut dur ? franchir, mais j'ai commenc? ? fr?quenter des hommes et j'ai trouv? cela tr?s agr?able. Au d?but, je leur cachais que j'avais ?t? un homme. Je savais que la plupart r?agirait par le d?gout; en plus, c'?tait interdit par la loi. Mais l'homme avec qui je vis aujourd'hui a accept? mon histoire avec curiosit?. Je lui ai m?me pr?sent? Nati -- c'est dire comme je ne suis pas jalouse et que je lui fais confiance! L'autre jour, alors que j'empruntais un sulky public, quelle ne fut pas ma surprise de reconnaitre l'homme qui avait op?r? mon changement de sexe, au centre de m?tamorphie. Il avait une forme ?quine. Je lui demandai s'il me reconnaissait. -- Bien entendu, ?monsieur!? Je me souviens tr?s bien, puisque c'est moi qui avais choisi votre apparence avec votre compagne. De plus, dans le m?tier que j'exer?ais, la m?moire des visages et des noms est tr?s important. Serait-il indiscret de savoir ce que vous ?tes devenu? Je lui racontait mes m?saventures. Il ?couta avec empathie, ou peut-?tre seulement avec professionnalisme. -- Et vous, comment en ?tes-vous arriv? ? tirer un sulky public en ville? -- Ce n'est pas par choix, vous le devinerez ais?ment. Bien entendu, le Centre marin du golfe Saint-Martin a ?t? ferm?. Et j'ai ?t? condamn?. Contrairement ? vous, on m'a donn? une alternative. J'ai d? choisir entre deux ans de prison ou dix ans de forme animale. J'ai choisi la seconde option. Je travaille ? peu pr?s gratuitement et je dois garder cette forme animale en tout temps. C'est une vie fort ennuyeuse. J'ai souvent envie de ruer dans les brancards, et je n'ai pas pu monter une femelle depuis mon arrestation. En entendant votre histoire, je me dis encore une fois que j'ai fait le mauvais choix. Il avait l'air triste. -- Donc, madame, o? puis-je vous emm?ner? Quelques images pour vous inspirer. Certaines exigent d'avoir 18 ans. Elles ne sont pas ? moi et risquent de dispara?tre...