J'ai toujours eu de la chance d'?tre n? dans cette famille. C'est ce que
tout le monde me disait, partout. Mon p?re, pharmacien, en Normandie,
avait une bonne situation, et ma m?re travaillait comme cadre dans une
banque. Bref, n? avec une cuiller en argent dans la bouche. Mon p?re
?tait quelqu'un de tr?s amusant, r?veur. Il aimait bien jouer ? cache-
cache avec nous, et savait faire des choses extraordinaires avec son
visage, tirer sur sa peau ? l'infini comme de l'?lastique. Ma m?re ?tait
assez grosse, et je me rappelle qu'elle s'est toujours plainte de ses
fesses, de ses seins, qu'elle trouvait ?pneumatique?. Mon p?re semblait
adorer ?a, quant ? lui. Je pense qu'elle pr?f?rait ?tre grosse car cela
la prot?geait des autres. Elle avait travaill? dans une boutique de
v?tement, mais ? pr?sent elle s'occupait de diverses associations.
Ma s?ur, Elise, s'est beaucoup occup?e de moi quand j'?tais petit. Mon
a?n?e de 5 ans, elle m'a toujours entra?n? avec elle, m'amenant chez ses
copines, me gardant. Jamais elle ne s'est plainte lorsque mes parents
lui demandaient de me garder, car ils devaient travailler tard. Et dieu
sait qu'ils travaillaient tard, le soir, parfois le week-end. Mon p?re a
toujours ?t? le grand absent de mon enfance, moi, Gabriel, ?lev? dans un
monde de femmes, de filles.
Je pense que j'?tais un gar?on normal, alors. La campagne Normande ?tait
assez classique, belle, presque ennuyeuse. Ma s?ur avait des amies, et
j'allais souvent jouer chez elles. Cela permettait ? mes parents d'avoir
un peu de temps pour eux. Je me rappelle m'?tre toujours beaucoup
ennuy?, au milieu des poup?es, des petits chevaux. Mes parents ?taient
tr?s amis avec le pharmacien d'un village voisin, les Palestres. Eux
avaient deux filles, l'une un peu plus ?g?es que moi, et l'autre d'un an
l'a?n?e de ma s?ur. Elles s'appelaient Emilie et C?line. Emilie ?tait
tr?s jolie, brune, et m?me si elle avait deux ans de plus que moi, j'en
?tais secr?tement amoureux. Tout du moins j'imaginais alors que c'?tait
un secret. Nous ?tions toujours fourr?s chez elles, pour un oui ou un
non, le week-end, et les vacances d'?t?. Pour elles non plus, la
pr?sence des parents n'?taient pas un fort, mais tous ensembles nous
nous amusions bien.
Avec le temps, les choses sont devenues plus ?fun? pour moi. Lorsque
j'ai eu 7 ans, (et elle, 12), nous avons pu jouer aux cartes, et
j'aimais beaucoup jouer aux cartes ? quatre. Et puis, aussi ? la
console, avec la console d'Emilie. Et nous regardions la t?l?. Bien
s?r, elles me consid?raient comme plus petits, moins int?ressant, plus
b?te. Je devais ?tre un poids pour elles, mais je ne m'en rendais pas
compte. Je n'avais de toute fa?on pas mon mot ? dire. Tout ce que je
voyais c'est qu'au moins je n'?tais pas seul, et qu'elles au moins ne me
disaient pas que j'?tais le ?fils de riche? du village.
*******
Autour de mes 7 ans; c'est l? aussi que tout a commenc?.
Je me souviens parfaitement de la premi?re fois. C'?tait un dimanche
apr?s-midi. Nous ?tions en train de regarder la t?l?, et ce n'?tait pas
tr?s int?ressant. Emilie dit soudain ?pourquoi ne pas jouer ? la
poup?e??. Elle avait re?u une tr?s grande maison de poup?e pour No?l, et
elle voulait toujours jouer avec.
C?line et ma s?ur souffl?rent, du genre ?oh non, pas ENCORE?. Elise me
regarda d'un air songeur, et dit alors. ?H?, mais pourquoi on pourrait
pas jouer ? la poup?e avec Gabriel??. Je la regardais, lui tirais la
langue et me mis ? courir partout dans la pi?ce en criant ?non non, non,
je veux pas!?.
Je me souviens qu'Elise a regard? C?line, comme deux filles qui allaient
faire une bonne blague, tandis que je r?p?tais encore et encore ?veux
pas veux pas veux pas!?
Elise m'attrapa, et me dit: ?non mais, pas jouer ? la poup?e AVEC toi!
?a sera TOI la poup?e!?
Je me souviens que ?a m'avait clou?. Je n'arrivais pas trop ? y croire,
d'?tre le centre de l'attention, pour une fois, qu'on fasse comme si
j'existais, et pas ?tre le boulet du groupe. Je me laissais faire. Ma
s?ur ne faisait plus tr?s attention ? moi depuis quelques mois environ
et j'en ?tais tr?s malheureux. On m'avait expliqu? qu'elle ?grandissait?
et que c'?tait normal.
Elles me firent asseoir sur une chaise, puis me coiff?rent, longuement.
Je n'avais pas les cheveux tr?s longs, mes cheveux couvraient mes
oreilles mais rien de plus. Puis, elles me mirent du vernis ? ongle, sur
les pieds, les doigts, des chouchous dans les cheveux, puis me pass?rent
leurs colliers de poup?es au cou. J'?tais content qu'on s'int?resse ?
moi, m?me si je n'?tais pas tr?s ? l'aise. C'?tait pourtant assez
?soft?. Je battais des mains en disant ?youpi!? et en courant partout
dans la pi?ce. Je me cachais dans la maison de poup?e. Puis nous avons
jou? ? cache-cache. A la fin de la journ?e, les filles m'ont fait jurer
de ne pas en parler, car ce serait notre ?secret?. Elles m'ont fait
jurer sur la maison de poup?e, et ensuite elles m'ont donn? un nom de
code de fille. J'?tais Charlotte. La 4?me fille du groupe.
*******
En rentrant ? la maison, je brulais de tout r?v?ler ? ma m?re, et bien
entendu, je le fis. J'?tais tellement heureux! Elise se fit punir par
mes parents, mais apr?s tout, ce n'?tait qu'un jeu, et je n'avais pas
l'air d'avoir ?t? maltrait?.
Le lendemain (c'?tait les vacances de No?l), nous devions aller de
nouveau en v?lo chez les Palestres. Au moment de partir, elle me dit
?Non, tu ne viens pas avec moi?. Je pleurais, je ne voulais pas qu'elle
m'abandonne. J'insistais, encore, encore, et elle finit par ?c?der?.
Elle me demanda alors de ne plus jamais rien r?p?ter ? nos parents car
sinon elle serait grond?e, et nous ne pourrions plus aller chez les
Palestres! J'acceptais, bien ?videmment. Qui aurais voulu se retrouver
seul plut?t qu'?tre la star des ?grandes? filles, et ne plus voir
Emilie?
A peine arriv?s, le petit man?ge du jour d'avant reprit! A ma demande,
bien s?r! C'?tait tellement excitant de voir ces trois filles s'occuper
de moi si gentiment. Emilie gloussait alors qu'elle me passait son
bracelet au poignet. SON bracelet! Puis elle me passa la main dans les
cheveux, me fit un petit bisou et me dit ?tu devrais laisser tes cheveux
pousser comme nous! Tu serais plus mignon!?. Elle semblait trouver ?a
tr?s dr?le, quant ? moi j'?tais tout rouge du compliment potentiel.
Ce man?ge dura en fait, et se reproduisit jour apr?s jour puis week-end
apr?s week-end. Nous arrivions, puis les filles m'habillaient avec des
robes de quand elles ?taient plus petites, des chaussures, du vernis de
toutes les couleurs sur les pieds ou les doigts, des colliers, bagues,
ou n'importe quoi qui les amusait. Puis nous nous installions sur les
canap?s, et nous regardions la t?l? ou nous jouions. J'?tais tellement
bien! Un peu avant de repartir chez nous, les filles me changeaient, me
lavaient, et je reprenais mes affaires. J'?tais aux anges.
Durant le mois de juin, un ?v?nement tr?s important se produisit. C?line
eut ?ses r?gles?. Bien s?r on ne m'en a pas parl?, mais nous en parlions
beaucoup entre filles. Les parents de C?line lui avaient expliqu?
qu'elle devenait une ?vraie femme? et qu'un jour elle devrait prendre
une pilule qui lui permettrait d'?tre une femme. Enfin, ? l'?poque elle
l'avait expliqu? ainsi.
R?trospectivement, je me dis que c'est ? cette p?riode que ma s?ur Elise
s'est mise ? ne plus m'aimer ou tout au moins ? vouloir se jouer de moi.
J'appr?ciais de plus en plus nos petits jeux, et Emilie jouait de plus
en plus avec moi. Le groupe ?tait un peu bris? depuis mon arriv?e, et
j'?tais devenu le centre de l'attention. La petite blague qu'elle avait
voulu me faire l'avait en quelque sorte isol?e.
Un jour de mi-juillet, alors que nous arrivions chez les Palestres,
Elise sorti de son petit sac une boite de m?dicament. Elle me tendit un
comprim? devant les autres filles
- ?Tiens, c'est pour toi?.
Elle ajouta
- ?C'est un comprim? pour filles, pour qu'aujourd'hui, tu sois une fille
comme nous!?.
- ?Mais, d'habitude, je ne suis pas une fille comme vous??
- ?Si bien s?r! Mais c'est...c'est comme un bijou en plus! Ou alors le
vernis, ou la robe! C'est un accessoire en plus! Tu ne vas pas t'en
apercevoir, mais en fait, ?a fera comme si t'?tais une fille encore
plus!?
- ?Mais je veux pas ?tre une fille! C'est juste vous!?
- ?Ne t'inqui?te pas! Ca ne dure pas plus que l'apr?s-midi! Ca sera fini
quand on sera de retour ? la maison! Tu te rappelles, c'est NOTRE
secret! Personne ne doit savoir! C'est le groupe des filles!?
J'acceptais, bien ?videmment. Je n'ai jamais su comment elle a pu se
procurer un stock ? la pharmacie, m?me si les rebus ?taient facilement
r?cup?rables et qu'ils ?taient nombreux.
C?line n'avait pas l'air content. Elle prit ? part Elise, elles
discut?rent. Nous avons ?cout? ? la porte avec Emilie, et les seuls mots
que nous avons pu comprendre ?taient que C?line n'aimait pas ?a, et que
?a allait trop loin. Elise semblait accepter. Elle ne m'a plus jamais
propos? ce m?dicament par la suite.
Nous avons jou? tout l'apr?s-midi, et mis ? part que j'ai beaucoup
pleur? quand il a fallu partir et que je me suis senti un peu malade, ce
fut tr?s bien, comme d'habitude.
Les jours suivants, Elise a d?cr?t? que comme il faisait tr?s chaud et
que nous faisions du v?lo, nous prendrions un jus d'orange avant de
partir.
*******
Les semaines pass?rent. A la rentr?e, mes parents m'ont propos? d'aller
chez le coiffeur, car mes cheveux descendaient un peu sur la nuque. Je
me rappelle que je ne voulais pas. Que j'ai tap? des poings par terre.
Que j'ai cri?! Je me rappelais encore et encore du sourire lumineux
d'Elise, de ses grands yeux marron envieux, qui me r?p?tait en me
caressant les cheveux qu'ils ?taient tellement beaux, qu'elles
voudraient les voir longs pour les brosser encore et encore. Elise
m'avait dit de ne surtout pas dire que je les voulais longs pour cette
raison, mais parce que je voulais avoir les cheveux comme les chevaliers
dans les livres. Heureusement, nous avions un livre d'histoire avec des
images de chevaliers virils aux cheveux longs pour confirmer, ce qui
r?conforta, bizarrement, ma m?re.
On ne peut que difficilement imaginer les effets que peuvent produire
l'absorption r?guli?re d'hormones f?minines ? un ?ge et ? un poids aussi
r?duit. Durant les premi?res semaines, j'?tais r?guli?rement malade, et
je soup?onne qu'Elise a d? essayer plusieurs dosages avant de trouver le
bon. Elle avait d? se renseigner dans des livres pour ?viter que les
effets soient trop visibles, trop vite. J'?tais de toute fa?on assez
maigre, et la pubert? ?tait encore loin. Mais je me rappelle de cette
?poque que mes joues ?taient bizarrement potel?es, alors que j'?tais
assez mince. De plus, j'ai toujours eu des l?vres assez larges, comme
celles de mon p?re. Les filles me disaient toujours, plus tard, que
j'avais des l?vres ? embrasser.
Mes parents m'appelaient ?le petit hamster?. A l'?cole aussi. Mais ?a me
plaisait beaucoup moins ? l'?cole.
*******
Lorsque j'ai eu 8 ans, Emilie en avait 10, ma s?ur 13 et C?line 14.
J'avais des cheveux blonds v?nitiens, qui commen?aient ? l?g?rement
boucler au bas de ma nuque d'enfant. Mon professeur m'avait fait la
remarque un jour d'? quel point ils ?taient beaux et ? quel point
c'?tait une bonne id?e de les mettre en valeur, et, afin de faire
terminer les quelques remarques que j'avais eu ? subir sur ma coiffure,
il avait choisi le spectacle de milieu d'ann?e sur ?La cour de la
Renaissance?, dans lequel je jouais le petit prince. J'?tais beau comme
le tableau, para?t-il. Toujours est-il que plus personne n'a jamais fait
de remarques, puisque, para?t-il, j'?tais ?beau?. Mon visage ?tait,
comme celui de nombreux enfants de cet ?ge, androgyne. Habill? en fille,
j'avais l'air d'une fille; en gar?on, d'un gar?on. Les hormones que je
prenais de temps ? autres sans le savoir devaient surement y jouer pour
quelque chose.
C?line venait d'avoir son premier petit copain, et le week-end pr?c?dent
ses 14 ans, il devait venir en cachette. Nous ne le connaissions pas car
il habitait assez loin et allait ? une autre ?cole. Aucun de nous quatre
n'?tait au courant, car ses parents le d?poseraient devant la maison, et
il passerait l'apr?s-midi. C'?tait une surprise. Sit?t arriv?s je me
suis chang?e (je me changeais tout seul, ? pr?sent), j'ai enfil? une
petite robe rouge et des chaussures ? boucle rouge et des socquettes
blanches, Emilie m'a coiff?e puis m'a fait quelques boucles, et j'ai mis
un joli vernis rose brillant sur mes doigts. J'aimais la sensation de me
voir en Charlotte, dans la glace, de voir le regard vert d'Emilie sur
mes cheveux, et mes jolis ongles roses.
Lorsque Fran?ois arriva, il y eu un moment de flottement et de
stup?faction. C?line ?tait tr?s excit?e, bien s?r, et Emilie aussi.
Elise a eu un moment d'h?sitation, et puis elle m'a pr?sent? ?voici
Charlotte, ma s?ur?. Fran?ois n'h?sita pas une seconde et me fit une
bonne paire de bises. Il passa l'apr?s-midi avec nous, sans sourciller,
ni se douter une seule seconde de ma fausse identit?. J'?tais tr?s
excit?e, et mes joues ?taient toutes rouges, d'autant que j'avais bu une
demi-coupe de champagne pour f?ter l'anniversaire!
En partant, Fran?ois nous dit ? toute au revoir, et me dit m?me que
j'?tais une tr?s jolie petite fille.
*******
Je ne sais pas comment elles s'organis?rent, mais en tout cas, Fran?ois
revint ? plusieurs reprises et jamais l'information sur moi n'est pass?e
de Fran?ois aux parents de C?line, ou ? mes parents. Peut-?tre fut-il
pr?venu? Peut-?tre pas. J'?tais tr?s convaincante comme fille.
Les 14 ans de C?line, mes 8 ans, ont chang? des choses. Nous avions le
droit d'aller ?en ville? seules. La campagne normande ?tait tr?s calme,
et ? l'?poque personne ne parlait d'enl?vements d'enfants. Un jour, les
Palestres nous ont emmen?s pour aller en ville, avant d'aller eux-m?mes
au travail. C'?tait notre premi?re sortie entre nous, ? l'ext?rieur du
village!
Arriv?s au premier toilettes publics, Elise me dit ?allons, viens, viens
te changer!?. Je la regardais, interloqu?, mais j'?tais encore petit, si
bien que je lui ob?is. Dans les toilettes, elle sortit de son sac tout
ce qu'elle avait pr?vu. Une petite jupe, un haut blanc avec des fleurs,
mes chaussures ? boucle rouges. Elle avait m?me pr?vu une barrette
rouges pour aller avec, pour mes cheveux. Il est vrai que mes cheveux
retombaient parfois devant mes yeux, mais je n'osais pas m'en plaindre
de peur qu'on me les coupe et que je ne revois plus jamais Emilie...
C?line et Emilie ne semblait pas au courant, mais elles n'avaient pas
l'air non plus m?contentes. Emilie me prit la main alors que nous
marchions. Je crois que je n'avais jamais ?t? aussi heureux.
Nous sommes all?s dans les magasins, et nous avons achet? un joli petit
sac pour C?line, puis dans un magasin de maquillage pour faire des
essais. Bien s?r, Emilie et Elise ?taient tr?s excit?es ? l'id?e de se
maquiller presque pour la premi?re fois! Et bien s?r, je fis le cobaye.
Emilie me passa du rouge ? l?vre, et alors que les autres filles ?taient
plus loin, me demanda tr?s doucement:
?Il para?t que c'est tout doux quand on fait un bisou. Tu peux me
laisser te faire un bisou sur la bouche??
Je devins tr?s rouge, et je murmurais encore plus doucement: ?oui?.
Ce tout petit bisou me fit danser la t?te, et alors que nous rentrions,
je souriais encore et encore. J'y pensais toute la nuit. J'avais une
amoureuse.
*******
Nous n'e?mes pas beaucoup l'occasion de r?essayer le maquillage dans les
semaines suivantes. C?line grandissait, et je crois qu'elle se rendait
compte instinctivement que ce n'?tait pas ?normal? de me faire ?a.
Lorsque nous arrivions et que j'?tais encore en gar?on, elle m'appelait
? nouveau ?Gabriel?, alors que les autres filles ne m'appelaient presque
que par mon nom de fille.
L'?t? arrivait, j'avais huit ans et demi. Mes cheveux ?taient au niveau
de l'?paule. Je devais les attacher la plupart du temps. J'avais fini
par aller chez le coiffeur (qui ?tait une coiffeuse), mais j'avais ?t?
tellement p?nible, j'avais cri?, et finalement la coiffeuse ne m'avait
coup? que les pointes, et avait r?tr?cit ma frange pour qu'ils ne g?nent
plus mes yeux, si bien qu'ils ?taient ?encore plus beaux?, selon mon
professeur. Je le soup?onne aujourd'hui d'avoir eu un penchant pour les
enfants inavou?, ou tout au moins un f?tichisme pour les jeunes pages de
la Renaissance. A l'?cole, certaines filles me pr?taient des barrettes
parfois, mais la plupart du temps les choses se passaient bien.
Le temps a encore pass? et se partageait pour moi entre l'?cole, les
cours de guitare, un peu de th??tre et les week-ends chez les Palestres.
J'?tais tr?s dou? ? l'?cole, si bien que j'avais saut? une classe. Comme
j'?tais de fin d'ann?e, j'?tais vraiment plus petit que les autres.
Durant l'hiver, nous avons pu plusieurs fois nous rendre en ville pour
nous promener ensemble, aller jouer au parc. Les premiers froids
arrivaient, et Elise m'avait pris des gros collants pour mettre sous mes
jupes ou mes robes. C'?tait beaucoup plus chaud que les pantalons, et il
ne restait de toute fa?on pas beaucoup de choix dans le grenier des
Palestres. Les vieux v?tements de C?line et d'Emilie ?taient remis?s
dans le grenier, probablement dans l'id?e de les garder pour une
cousine, une ni?ce, ou des futurs petits enfants. Mais une partie avait
?t? d?j? donn?e l'hiver dernier ? des cousins et cousines de nos ?ges,
et les go?ts de C?line ?tant assez unisexe en mati?re de pantalons, ils
?taient partis pour la plupart. Il ne me restait donc que les jupes et
les robes ? ma taille. Il faisait tr?s froid, j'?tais donc en collants.
Elise prit m?me sur elle d'en parler ? ma m?re, pour lui dire que comme
nous allions en ville, et que j'avais froid, elle avait emprunt? des
collants pour ne pas que j'ai froid. Elise savait comment se faire
valoir! Ainsi, pour les jours d'hiver, j'avais d? enfiler mes collants
pour aller ? l'?cole, sous mes pantalons, pour ne pas avoir froid.
Personne ne le savait, et m?me si au d?but j'avais un peu peur, j'?tais
finalement tr?s content d'amener un peu de ?Charlotte? ? l'?cole, ?
l'insu de mes parents et de mes camarades de classe.
Avec les cours de guitare, on m'a demand? de ne plus me ronger les
ongles, au moins pour la main droite qui joue les notes. Je me rongeais
souvent les ongles, et mon p?re m'avait donn? un vernis transparent
l?g?rement brillant qui avait mauvais go?t pour ?viter de les ronger.
C'?tait ce qu'on utilisait pour les emp?cher d'?tre rong?s. Mais moi, je
continuais ? les ronger. Mais j'aimais bien le vernis, qui ?tait
brillant.
Au milieu du printemps, quelque chose de bizarre est arriv?. En sortant
de la douche, je remarquais que mes t?tons ?taient gonfl?s. On aurait
dit qu'un moustique l'avait piqu?. Ce n'?tait vraiment pas grand-chose,
cela ne grattait pas, cela n'?tait pas douloureux. C'?tait comme une
bosse, mais sans bleu. J'appelais Elise, je lui montrais, et je lui
demandais ce que c'?tait?
Elle me r?pondit que ?a n'?tait probablement rien, que ?a allait passer.
Je sentis dans son regard une certaine panique. Je pense qu'elle n'avait
pas pr?vu ?a. A table, le soir, Elise a pris sur elle d'en parler, pour
dire ? ma m?re qu'apparemment, j'avais h?rit? de sa forte constitution,
et que j'avais d?j? un peu de bedaine! Elle devint tout rouge (elle
?tait tr?s pudique) et mon p?re sourit gentiment, comme pour prot?ger ma
m?re. Le soir, ma m?re vint me voir. Elle me regarda de partout, me
tripota, m'ausculta. Elise ?tait pr?sente, et elle avait l'air tr?s
nerveux. Elle ne me regarda pas une seule fois.
- ?C'est bizarre, ?a, ce que tu as l? sur la poitrine non? On dirait un
petit ?d?me...?
- ? Non, ?a n'est rien, en tout cas, il n'a pas l'air d'avoir mal!?
- ?Tu crois que je devrais en parler ? papa??
- ?C'est comme tu veux maman! Mais en tout cas, ?a n'a pas l'air
m?chant! Peut ?tre juste qu'il est fait comme ?a, tu sais comme
Christophe dans ma classe!?
- ?Ah, mais il est beaucoup plus gros! Gabriel il est normal!?
- ?Non! Il a un peu de bidon, et des fesses aussi! C'est juste qu'il se
porte bien!?
- ?Tu dois avoir raison...?. Elle s'adressa ? moi ?tu manges correctement,
hein? Rien entre les repas??.
- ?Oui maman!?
Elise ria: ?Oui, tiens, il mange plein de bonbons chez les Palestres!
Les r?serves de la pharmacie, les bonbons sans sucre!?
Ma m?re sourit. Elle connaissait bien ces bonbons. Elle parut rassur?e,
et nous laissa nous coucher.
Ces petits nodules ne disparurent pas, mais ne grandirent pas. Je pense
qu'Elise voulait ?viter que la situation ne s'aggrave car elle n'aurait
pas pu le cacher si la situation avait ?volu?. Mon p?re ?tant dans la
m?decine, il n'aurait pas manqu? de remarquer ?a s'il n'avait pas ?t? si
distrait...
*******
A fin juin, ? 9 ans et demi, Fran?ois est venu avec son petit fr?re
Antoine, qui avait un an de plus que moi. Il n'arr?tait pas de me
coller, de m'emb?ter, insistait toujours pour me toucher. Il ?tait tr?s
gentil et pour une fois je pouvais jouer avec un copain de mon ?ge. Nous
avons jou? tous les deux, et les trois autres filles jouaient ensemble.
Elles sont ensuite parties dehors avec Fran?ois, faire du v?lo, chose
qu'elle ne pouvait jamais faire lorsque j'?tais avec elles. Emilie
essayait souvent de venir jouer avec nous, mais Antoine essayait
toujours de la repousser. Moi au contraire, je voulais qu'elle soit l?,
mais j'?tais aussi tr?s excit? par la nouveaut? que repr?senter un
nouvel enfant avec nous. Au retour, Elise appela C?line, puis elle vint
me voir pour me questionner dans ma chambre:
?Alors, tu as bien aim? jouer avec Antoine??
?Oui! Au moins, lui, il ne veut pas jouer ? la poup?e faire des trucs de
filles!?
?Mais, toi, tu es quand m?me un peu une fille, non?
?Non!?
?Avec, nous, alors, au moins??
?Oui! Mais sinon, non!?
?Et avec lui? Tu vas lui dire qu'en fait, tu es un gar?on??
?Je ne sais pas! Au moins j'aurais un copain!?
?Tu penses qu'il s'int?resserait ? toi si tu ?tais un gar?on? Il a d?j?
plein de copains gar?ons! Et puis il va le r?p?ter ? son fr?re, et aux
Palestres, puis ? papa et maman, tu ne crois pas??
?Euh...mais oui, mais, mais, pourquoi tu dis tout ?a??
?En fait, Antoine voudrait que tu viennes chez eux dimanche prochain!
Ils habitent en ville, les Palestres pourraient te d?poser pas tr?s loin
en y allant!?
?Oui, mais moi je veux venir avec toi chez Emi et C?line!?
?Oui mais, c'est bien que tu te fasses des copains de ton ?ge aussi,
non??
?Non, mais, oui, mais pas en fillleeeeeeeeeeee!?
Elise s'approcha de moi, et me passa le bras autour du cou, sur mon lit.
?Tu te trouves pas jolie en fille??
?...?
?Gabi? C'est vrai, t'aimes pas ?a, en fait? Nous on pensait que t'aimais
bien, quand m?me, un peu?
?...?
Elle s'approcha encore et me parla doucement.
?Tu sais, m?me si tu vas chez Antoine, Emi elle t'aimera encore, hein!?
?C'est vrai??
?Oui! Elle t'aime vraiment beaucoup, et en plus, si tu la vois pas un
week end, elle aura encore plus envie de te retrouver apr?s! Ca la
rendra jalouse, elle voudra te reconqu?rir!?
?Ah oui?!?. J'?tais sinc?rement enchant? par cette ?ventualit?.
?Oui! Mais si tu ne veux pas qu'on ait des probl?mes, il faut que tu
joues le jeu! Et puis, franchement, tu es vraiment tr?s jolie en fille.
Antoine a d?j? plein de copains gar?ons, il voudra surement se mettre en
quatre pour te conqu?rir et ?tre ton meilleur ami?.
J'h?sitais un instant. Mais apr?s quelques minutes de c?lins, de
persuasion de ma s?ur, je finis par accepter. Elise r?cup?ra aupr?s de
C?line les affaires pour ce week-end-l?, et me le donna au dernier
moment avant que les Palestres ne m'am?nent. J'avais beaucoup r?fl?chis
? cette histoire, et j'avais finalement assez peur qu'Antoine ne se
moque de moi s'il d?couvrait que j'?tais un gar?on. Et avec Antoine,
Fran?ois, et donc C?line. D'autant que C?line avait beaucoup chang?,
depuis qu'elle ?tait au lyc?e, chez les ?grands?. Elle paraissait
distante, et me faisait parfois des remarques sur le fait que je sois
?d?guis? en fille?. Cela me blessait beaucoup, mais comme Emilie prenait
toujours ma d?fense, elle ne disait trop rien.
Je me changeais dans les toilettes publiques. J'avais une petite robe
bleue et rouge ? rayures larges, des ballerines noires, de fins collants
transparents. Mes cheveux, qui n'avaient pas ?t? coup?s depuis un an,
?taient un peu ?pais, et descendaient en boucle au d?but de mon dos.
J'avais ajout? ma barrette rouge pour ne pas les avoir dans mes yeux. La
robe ?tait un peu moulante car C?line devait ?tre un tout petit plus
mince que moi ? mon ?ge. Ainsi, on voyait assez nettement mes deux
petits t?tons et mes fesses rebondies d'enfant. Elise m'avait mis deux
jolis bracelets brillants, et j'avais pass? mon vernis anti ongles
rong?s. J'avais ?galement des chaussures montantes bleues avec des
?toiles sur les c?t?s. Avant de frapper ? la porte, je me regardais dans
la glace. Ce geste de coquetterie m'?tonna de moi-m?me, alors que
j'?tais assez pudique d'habitude. Je crois que j'?tais surtout stress?e.
J'avais assez chaud et mes joues ?taient rouges, et mes yeux brillaient
beaucoup!
L'apr?s-midi avec Antoine ?tait super. Il ne semblait jamais ? court
d'id?es, et avait un nombre infini de surprises ? me montrer. Elise
avait raison: il ?tait tellement plus facile d'?tre une fille pour un
gar?on comme lui, qui ne semblait en avoir jamais vue! Il parlait
beaucoup et avait l'air en fait aussi stress? que moi, et il m'autorisa
m?me ? acc?der ? la salle de bain de sa m?re, pour que je puisse me
recoiffer. Il semblait comme hypnotis? par mes cheveux. Depuis quelques
semaines, ma m?re avait dit que pour qu'ils restent en bonne sant?, il
fallait que j'utilise des soins nourrissants. J'utilisais les siens, et
depuis j'avais des couleurs de feu et d'or partout dans ma chevelure. Je
l'adorais. Je ne cessais de les coiffer, les regarder, les toucher,
malgr? les avertissements de ma m?re de les laisser tranquille. M?me mon
p?re d'habitude si distrait m'avait compliment?. A un moment de l'apr?s-
midi, Antoine me proposa d'aller marcher dehors avec lui pour aller au
bord du lac. Alors que nous marchions dans la rue, il me prit
soudainement la main. Je restais sans voix, et n'osais ni le regarder,
ni parler, ni rien. Nous continu?mes ainsi, tout du long du trajet, sans
un mot. Arriv?s au lac, nous sommes rest?s ainsi une heure environ. Je
ne comptais plus le temps. Tout dans ma t?te ?tait embrouill?, je ne
savais pas quoi faire. A ce moment-l?, pour la premi?re fois, peut-?tre,
il se produisit un changement dans ma t?te. Je n'?tais plus Gabriel.
J'?tais Charlotte. Pi?g? dans mon propre pi?ge. Et plus le jeu
continuait, plus il allait ?tre difficile de reculer.
Il me passa un bras autour du cou, et me fit un bisou dans le cou.
J'?tais p?trifi?e, et comme t?tanis?e. Il me dit doucement ?tu vas
bien??. Je r?pondis d'une toute petite voix suraig?e et ridicule ?oui?.
Je voulais hurler ?non?, mais j'?tais trop terroris?e. Il me proposa de
rentrer, et nous sommes rentr?s. Je repris mes affaires peu de temps
apr?s, et au moment de partir il me fit un petit bisou dans le cou. Je
n'osais lui r?pondre, et je partis en courant. Je suis ensuite chang?
dans les toilettes, puis ensuite, j'ai pleur? un long moment.
Sit?t arriv? ? la maison, j'ai d? d'abord tout raconter ? ma m?re ?c'est
un copain sympa, on a jou? ? la console?, puis ? Elise. Au vu de mon
trouble, elle devina assez vite ce qui s'?tait pass?. Peut-?tre m?me
l'avait-elle pr?vu, et probablement planifi?. Elle me demanda si je
voulais y retourner. Je ne savais que r?pondre.
*******
La semaine suivante, je retournais chez les Palestres. C'?tait le
premier jour de juillet. Il s'av?ra que la semaine pr?c?dente, Elise n'y
?tait pas all?, car C?line voyait Fran?ois et Emilie ?tait en famille.
Seule, ? la maison.
C?line fut plus distante que jamais. Je jouais avec Emilie, nous
passions un tr?s bon moment. Ma s?ur avait d?cidemment raison tout le
temps. Emilie redoublait d'affection, elle ne cessait de me toucher les
mains, les ?paules, les jambes, nous riions tous les deux. J'?tais en
fait tr?s heureux ? ce moment-l?.
Au moment du go?ter, alors que je me levais, je me pris les pieds dans
ma robe, et je tombais par terre. Il n'y avait pas de mal, mais le jus
d'orange coulait partout. C?line avait l'air furieux. Elle laissa
?clater sa rage:
?Mais merde! Gabriel, quand-est ce que tu vas arr?ter de te d?guiser l?,
...t'es une tapette d?guelasse, tu me d?goutes, allez putain, tu fais trop
honte quoi, va te rhabiller!?
Je fondis en larmes et Emilie qui ?tait ? c?t? de moi se serra contre
moi
?Et toi, Emilie quoi! Pourquoi tu vas pas te trouver une copine normale,
au lieu de te coller ? ?a! Et toi Elise, hein! ?a t'amuse de faire ?a ?
ton fr?re? Tu crois qu'il va ?tre heureux plus tard? Qu'il va grandir
normalement? Tu penses que c'est comme ?a qu'on devient un vrai homme?
Tu me d?goutes autant que lui! Non plus! Car lui, au moins, il a rien
demand?! Je m'en fous, je vais tout balancer, maintenant, tes parents il
faut qu'ils soient au courant, ?a peut pas continuer!?
Nous ?tions tous soudain tr?s p?les. Emilie me serrait le bras tellement
fort que ses jointures ?taient blanches. Elise serrait les dents, et
regardait C?line, ? l'autre bout de la table. Elle tremblait, se tenait
droite, livide. Elise r?pondit
?Alors c'est ?a? Tu veux que je raconte que tu as couch? avec Fran?ois
peut ?tre? Je SAIS que tu l'as fait, j'en ai la PREUVE. Tu penses que
vous avez ?t? discrets? Mais TOUT LE MONDE est au courant que tu l'as
fais. Et tes parents aussi vont l'?tre!?
?Je m'en fous, c'est moins grave! Putain, Elise, tu peux pas faire ?a ?
ton fr?re, quoi! C'est une victime! Il a rien demand?!?
Soudain, je parlais. Les mots sortirent de ma bouche, mais je ne
semblais pas les dire. J'?tais dans un ?tat second
?Mais moi, C?line, j'aime bien ?tre Charlotte! De quoi tu te m?les,
d'abord? J'ai toujours ?t? heureux, ici avec vous, avec Emi. Je me suis
toujours amus?, et vous ne m'avez accept? que parce que j'?tais en
fille.?
?Oui, mais tu ne comprends pas. C'est ? cause de ta s?ur! Elle t'a forc?
? le faire!?
?Mais non! Tu mens! Je le fais parce que j'aime!?
Ce fut au tour d'Elise:
?Pourquoi t'es m?chante avec Charlotte! T'as pas le droit, c'est ma
copine! C'est ? moi! Ma copine! Tu as pas le droit de me l'enlever! PAS
LE DROIT!?
Elle fondit en larmes. Et elle se jeta dans mes bras en gros sanglots.
Dans MES bras. C?line resta au bout de la table. C'?tait comme si une
bombe avait ?t? jet?e au milieu de nous. Mais la tension ?tait tomb?e,
d'un coup.
?Ok...comme vous voulez. Mais moi, je ne veux plus rien avoir ? faire avec
?a. Je me casse chez Fran?ois. A+?.
Je pensais alors qu'un jour, je pourrais peut ?tre dire ?Je me casse
chez Antoine!? ou ?Je me casse chez Emi!? . Cette pens?e me fit rougir,
je me sentais honteux, presque coupable, alors que j'avais dans mes bras
mon amour d'Emilie.
Notre amiti? d'enfance s'?tait rompue, et elle ne fut plus jamais
pareille apr?s ce jour.
*******
Les jours suivants et l'?t? furent tr?s compliqu?s pour moi. Elise ne
voyant plus C?line, elle allait voir d'autres copines, des copines de
classe. Qui me connaissaient. Mais ce n'?tait pas des copines d'enfance
pour moi, j'?tais tr?s seul. Parfois je pouvais retrouver Emilie, chez
mes parents, ou chez elle, et nous jouions tous les deux, moi en Gabriel
ou en Charlotte. Il y avait comme une fr?n?sie dans notre amiti?,
puisqu'enfin nous ?tions ?seuls?, que plus rien ni personne n'emp?chait
la r?alisation de notre amiti?. Fr?n?sie, aussi, car nous sentions que
c'?tait une fin, que quelque chose allait nous s?parer. Et puis, il y
avait Antoine, aussi. Je ne lui avais pas donn? notre num?ro de
t?l?phone, car je craignais qu'il ne tombe sur mes parents. En fait, ce
sont mes parents qui sont tomb?s sur les siens.
Un jour, nous sommes all?s ? la ville, avec mes parents. A Caen. Nous
nous promenions, tous les quatre, pour trouver de nouvelles chaussures
pour Elise. Mes parents avaient beaucoup d'argent, et acheter des
chaussures pouvait vite tourner ? l'avalanche. Elle finissait sa
croissance, et ma m?re avait d?cr?t? que puisqu'elle ne grandirait
surement plus trop, on pouvait commencer ? lui acheter s?rieusement des
chaussures. Nous faisions donc tous les magasins. Et puis soudain, je
vis les parents de Fran?ois. Je me cachais derri?re ma s?ur, puis voyant
que ?a ne serait pas suffisant, je me retournais et me mis au sol pour
faire semblant de refaire mon lacet, derri?re un arbre. Elise se
retourna vers moi, elle avait l'air apeur?e. Je suivis la conversation.
?Bonjour, excusez-moi, vous ?tes les Marandin, c'est ?a??
?Oui, c'est nous??
?Nous nous sommes d?j? crois?s, chez les Palestres, il y a quelque
temps. Vous vous rappelez??
?Ah oui, bien s?r! Comment allez-vous! Comment va votre fils Fran?ois?
Ma fille me parle souvent de lui!?
?Tr?s bien! Mais c'est surtout Antoine qui veut voir votre fille, je
crois!?
?Ah??
?Oui, l'autre jour elle est venue jouer chez lui!?
Heureusement, nous pr?cisions rarement chez nos parents chez qui nous
allions. Heureusement ils n'ont pas donn? de pr?noms. Heureusement, ils
ne m'avaient jamais vu.
?Ah! bien tr?s bien, c'est bien qu'elle puisse jouer avec des gens de
son ?ge! J'esp?re qu'ils ne font pas de b?tises!?
?Oh, non Antoine est un tr?s gentil gar?on. D'ailleurs, il faudra que
vous la rameniez, un de ces jours, ?a lui ferait tr?s plaisir, il nous a
beaucoup parl? d'elle!?
?Bien oui, pourquoi pas demain ou apr?s-demain? Il ne se passe pas
grand-chose en ce moment...?
Je sentis le regard lourd d'Elise sur mes ?paules ? ce moment-l?. Mes
parents remerci?rent pour l'invitation. Apr?s d'autres achats de
chaussures, nous sommes finalement rentr?s.
Elise m'appela dans sa chambre. Dans la cohorte de chaussures qu'elle
avait achet?es, elle m'avait pris des petites chaussures ? talons ? ma
pointure, l?g?rement plus petite que la sienne. Pas grand-chose, juste 3
ou 4 centim?tres. Des petites chaussures bleues. Elle m'a dit que ?a
plairait surement ? Antoine. Elle appuya sur le mot, en me regardant en
souriant. J'?tais terriblement g?n?.
Elle me dit ensuite qu'elle s'?tait arrang?e, et qu'elle m'am?nerait en
ville en bus. Elle, irait passer la journ?e avec C?line en ville, et moi
j'irais chez Antoine. Chez Antoine.
Je me retournais toute la nuit dans mon lit, j'?tais terriblement
angoiss?. A quoi est-ce que je jouais. A quoi est-ce que Elise jouait?
Etre Charlotte avec Emilie, c'?tait un jeu, entre nous, une sorte de
convention, de petit secret. Mais c'est parce que j'?tais son amoureux,
et elle mon amoureuse. Mais rien de plus.
Le lendemain, Elise m'habilla avant d'arriver avec des affaires sorties
je ne sais d'o?. J'avais une robe d'?t? blanche et bleue ? carreau assez
courte, mes chaussures ? mini-talons. Elle avait achet? un vernis ?
paillette dor?es pour mes pieds et mes doigts. Elle ajouta ensuite un
peu d'ombre ? paupi?re ? paillettes, comme les petites filles mettent
pendant les f?tes. Elle me coiffa avec deux couettes, puis me mis mes
deux bracelets. Dans le miroir, j'avais l'air d'une petite fille
terroris?e. Elle me mit ensuite un peu de rouge aux joues, puis resta
jusqu'? ce que je frappe.
L'apr?s-midi fut tr?s agr?able, troublante, mais globalement sympa.
Antoine voulait que je reste jusqu'? ce que ses parents rentrent pour
qu'ils me ram?nent, mais je suis parti avant, alors que ma s?ur passait
me chercher. Nous sommes rentr?s en bus. Elle ne cessa de me
questionner, mais je ne r?pondais pas grand-chose. J'?tais en fait assez
troubl?, car j'avais vraiment pris du plaisir ? jouer avec lui. Il
n'avait pas ?t? p?nible ? essayer de me toucher comme la premi?re fois,
et je trouvais que c'?tait plus agr?able ainsi. Il m'avait propos? de
revenir le jour suivant, car nous avions commenc? ? construire un petit
train (il avait un circuit de train immense, et une pi?ce presque
enti?re r?serv?e ? ?a) et il voulait que nous le finissions.
J'y retournais le lendemain, le surlendemain, et encore le jour suivant,
car nous ne finissions jamais ce train. Les chaussures ? talons me
cassaient le dos, me faisaient mal aux pieds, mais Antoine paraissait
adorer ?a et le bruit qu'ils faisaient dans la rue ?tait amusant. Elise
me dit que c'?tait normal, et que plus les talons seraient grands, plus
on me regarderait avec envie! Je ne me posais plus trop la question du
probl?me de savoir en tant que quoi ou que qui Antoine m'appr?ciait.
Nous passions des supers moments tous les deux, et ? vrai dire je
pr?f?rais ne pas me poser la question. Avec lui, j'?tais Charlotte.
C'?tait comme si un deuxi?me cerveau s'?tait cr?? dans ma t?te, comme si
je parlais dans une autre langue. Chez les Palestres, j'?tais Gabriel en
Charlotte. Ici, j'avais toujours ?t? Charlotte. Chaque geste, chaque
attitude, tout ?tait ? construire, tout ?tait nouveau pour moi.
Le dernier jour, alors qu'il ?tait parti aux toilettes, je l'ai regard?
par le trou de la serrure. Son sexe ?tait assez semblable au mien, cela
me rassurait. Mais le fait qu'il fasse pipi debout, comme moi ? la
maison, et que moi je fasse assis ? cause de ma robe me perturbait. En
fait, le fait d'?tre une fille alors que finalement je le consid?rais
comme un copain me troublait vraiment. Il ?tait impossible ? pr?sent de
lui dire que j'?tais un gar?on, puisque mes parents et ses parents se
connaissaient; mais en m?me temps ce jeu ne pouvait pas durer.
Quelques jours apr?s, je retournais chez les Palestres. J'?tais tr?s
excit? ? l'id?e de montrer ? Emilie mes nouvelles chaussures, qu'elle
adora. Nous jou?mes ? deux pendant l'apr?s-midi, et apr?s avoir tourn?
et retourn? la question dans ma t?te, je la questionnais:
?Emi??
?Oui??
?J'ai une question! Une vraie question!?
?Tu me trouves belle??
Parler de moi au f?minin ?tait un ?norme effort pour moi. M?me en
Charlotte, je ne me d?signais pas au f?minin, m?me pas dans ma t?te.
?Oui! Tu es tellement belle. J'adore tes cheveux, tes yeux, tes bras
tout doux tes jambes toute douce!?
Elle ?tait sinc?re. Ces yeux brillaient comme lorsqu'elle ?tait si
proche de moi.
?Emi? Est-ce que tu m'aimes??
Elle ?tait toute proche de moi, sur le lit. Elle me regarda
s?rieusement, la t?te l?g?rement pench?e:
?Oui! Tu es ma meilleure amie!?
Meilleure amie. Le mot ?tait dit.
?Mais...tu m'aimes, comme quoi? Comme Charlotte, ou Gabriel? Je suis quoi
pour toi??
Elle ne parut pas comprendre la question.
?Mais...comme toi! Comme toi, oui! C'est qu'un pr?nom!?
Elle continua:
?Charlotte? Est-ce que tu aimes plus Antoine que moi? je suis toujours
ta meilleure amie??
?Oui, Emi. Toi c'est pas pareil, tu es mon amoureuse! C'est juste un
copain lui!?
?Mais...tu es Charlotte avec lui aussi??
?Oui...?
?Mais pourquoi? Tu as pas le droit! Charlotte c'est ? moi! C'est que ?
moi!?
Elle semblait boulevers?e et pleurait.
?Emi! Je t'ai d?j? dit! J'ai pas le choix! Sinon il n'y aura plus de
Charlotte du tout! Il faut que tu comprennes!?
Elle pleurait ? chaudes larmes ? pr?sent
?Mais...mais...?a va ?tre ton amoureux alors? Tu vas plus m'aimer! Je veux
pas rester toute seule! T'es mon amie!?
?Mais non! C'est pas mon amoureux! On passe juste des moments sympas?
?Menteuse menteuse menteuse menteuse! Des moments SYMPAS! TU VIENS PLUS
JAMAIS ME VOIR, JE RESTE SEULE!?
Je passais le reste de l'apr?s-midi ? essayer de la consoler. Il y avait
quelque chose de rompu. Nos rapports ne furent, l? non plus, plus jamais
les m?mes.
La semaine suivante, Elise est partie en vacances une semaine avec des
copines. Je fus tr?s malade, triste et je ne voulais pas sortir.
J'?touffais, j'avais froid, chaud, je me sentais vraiment mal. Mes
parents ont pens? que c'?tait parce que ma s?ur me manquait. Je me
sentais extr?mement sensible ? tout, et je pleurais beaucoup. Mais au
bout de quelques jours j'allais mieux, et lorsque ma s?ur est rentr?e,
les choses sont rentr?es dans l'ordre.
*******
L'?t? continua ? se passer, entre la maison d'Emilie et celle d'Antoine.
A la rentr?e, j'arrivais au coll?ge. J'avais encore 9 ans, ayant un an
d'avance et ?tant de fin d'ann?e. J'?tais vraiment tout petit par
rapport aux autres. Heureusement, je faisais d?j? 1m50, j'?tais donc
relativement respect?. On se moquait un peu de mes cheveux, et il n'y
avait plus d'instituteur indulgent pour ?a. Je portais la plupart du
temps une casquette, un bonnet, ou en classe je les attachais ou les
faisais entrer dans mon col de chemise. Mes cheveux ?taient ? pr?sent
vraiment longs, et arrivaient dans le milieu du dos, aussi long que la
plupart des filles. J'en prenais grand soin, et lorsque j'allais chez le
coiffeur, j'?tais tr?s pr?cis sur mes demandes. Mes jolies boucles et le
volume plaisaient beaucoup aux filles, ainsi que mon visage encore
poupon. Je craignais de devenir comme ma m?re qui ?tait vraiment grosse,
car je voyais bien que j'?tais tout potel? de partout. Mes fesses
m'inqui?taient assez, car je faisais une taille de plus en pantalon
qu'en haut. Autant lorsque j'?tais en Charlotte, la jupe masquait mes
fesses, mais en pantalon, c'?tait parfois g?nant.
J'?tais dans le m?me coll?ge qu'Emilie, qui ?tait dans la classe au-
dessus de moi. Elle me d?fendait contre ceux qui m'emb?taient, et gr?ce
? elle j'ai connu plein de filles et de gar?ons qui m'ont appr?ci? et
d?fendu. Antoine - heureusement - n'?tait pas dans cet ?tablissement.
Nos apr?s-midi avaient chang? depuis notre dispute. Ils s'?taient en
fait ?fillis?s?. Emilie ne m'appelait plus jamais Gabriel, sauf devant
des gens, et lorsque nous ?tions ensemble nous ne jouions qu'? des jeux
de filles. C'?tait comme si elle voulait s'approprier l'identit? de
Charlotte, la privatiser, que cela ne reste qu'? elle. Nous passions des
heures ? essayer les maquillages de C?line, ? ?changer nos v?tements, ?
parler des gar?ons de la classe. Je devenais tr?s expert pour conna?tre
tous les ragots, et cela me rapprochait beaucoup de sa bande de copines
avec qui j'?tais devenu assez proche.
J'?tais tr?s heureux ? l'?poque, pendant les 3 premi?res ann?es du
coll?ge. Mon corps me convenait assez bien, en dehors de mes fesses.
J'?tais un ?petit ange?. Je faisais un peu plus 40kg, pour 1m53, ce qui
?tait grand pour la 6?me. Mes traits ?taient tr?s fins. Je n'aimais pas
mon nez. On le disait ?anglais?, ou ?de cochon?, ou ?relev??, ou ?en
trompette?. Bien s?r, moi, je voyais ?de cochon?. Tout en moi me faisait
penser ? un cochon. Mes joues rondes, ma fossette au menton, mon nez.
Mes yeux bleus me paraissaient trop gros. Ma peau de normand ?tait
blanche, aussi, et elle devenait rouge rapidement au soleil. Je n'aimais
pas ce visage. J'aimais mes petits bras potel?s, mes jambes pleines, mes
petites mains. Elles plaisaient beaucoup aux filles. J'ai eu d'ailleurs
plusieurs petites copines durant ces premi?res ann?es. Mes cheveux longs
et blonds, le soin que je leur donnais plaisait assez aux filles. De
plus, je n'?tais pas tr?s large d'?paules. J'?tais une sorte de copain
?aux dimensions? des filles. Je ne leur faisais pas peur comme les
grands 4?me ou 3?me redoublants qui se rasaient la moustache et fumaient
? la r?cr?ation. Bien s?r, j'?tais loin de l'esth?tique du ?bad boy?.
Mais au coll?ge, les filles ne fantasmaient pas encore sur ce genre de
personne...
Il se passa trois ?v?nements majeurs durant ces trois premi?res ann?es
de coll?ge.
Tout d'abord, mon sexe. Etant ?lev? dans une famille tr?s pudique, ce
n'?tait pas un sujet de conversation. Ou m?me d'observation. Mes parents
n'?taient pas religieux d'aucune sorte, mais il y avait un tabou sur le
sujet. Cependant, mes camarades de classe m'ont parl? assez vite du
plaisir qu'ils se donnaient, seuls, avec leur sexe. Et puis, aussi, j'en
ai aper?u. Parfois. Furtivement. Dans les vestiaires du sport, ou ceux
qui pissaient librement contre les haies, ou dans les pr?s. Je trouvais
mon sexe petit. En fait, le leur avait l'air d'avoir grandi, et grossi.
Surtout grossi, en fait. Et ils me disaient parfois qu'il devenait
?dur?. Mais moi, il ne devenait jamais dur. M?me pendant les moments o?
il devait, il bougeait un peu, parfois grossissait, se gorgeait de sang,
mais ne prenait jamais de taille comme d?crit par les autres. Je
supposais qu'ils exag?raient. Cela m'intriguait, mais je n'osais pas en
parler. Je supposais que cela viendrait plus tard.
Le 2?me ?v?nement, c'est que j'ai embrass? une fille. Et un gar?on. Mais
pas en m?me temps. Durant ces ann?es, mon identit? ?tait assez trouble.
Lorsque j'?tais au coll?ge, j'?tais toujours avec Emilie et ses copines.
Comme j'?tais assez proche d'eux, et de leur pr?occupation, ma conduite
?tait finalement assez proche de celle de quand j'?tais Charlotte avec
Emilie. J'?tais donc une Charlotte dans un corps de Gabriel. A la
maison, j'?tais 100% Gabriel. Chez Emilie, j'?tais Gabriel, mais d?guis?
en Charlotte, m?me si Emilie essayait de toujours plus me faire ?tre
Charlotte. Enfin, avec Antoine, j'?tais 100% Charlotte. Bref, il ?tait
difficile de doser qui j'?tais, et j'?tais parfois un peu perdu. Mais ce
qui est s?r, c'est que j'ai embrass? Emilie, en Charlotte. Et en
Gabriel. J'ai eu aussi une petite copine au coll?ge, Sarah. Mais durant
la p?riode o? j'?tais avec Sarah, Emilie ne voulait plus que je
l'embrasse en Gabriel. Elle disait que j'?tais ? Sarah, maintenant. Et
j'ai aussi embrass? Antoine. Enfin, je l'ai laiss? m'embrasser, plut?t.
Le 3?me ?v?nement, c'est mon p?re et ma m?re. Lorsque j'?tais en
quatri?me, peu apr?s mes douze ans, mon p?re a commenc? ? tromper ma
m?re avec une pr?paratrice de sa pharmacie. Elle ne l'a pas su tout de
suite, mais elle a commenc? ? d?primer (ou alors est-ce sa d?pression
qui a pouss? mon p?re dans les bras de cette femme?). Et elle s'est mise
? boire, et ? grossir. Nous vivions une p?riode tr?s difficile. Mon
p?re, qui avait toujours ?t? un r?veur, s'enfermait dans le garage pour
construire des maquettes, ?crire, dessiner. Et ma m?re d?primait, et
elle grossissait beaucoup. Moi-m?me, j'avais tendance ? grossir, et je
craignais d'?tre entra?n?. Au fur et ? mesure que leur couple se
d?litait, la r?percussion se faisait sentir sur mon corps. Je passais
par une p?riode de boulimie, et me concentrait de plus en plus sur mon
travail ? l'?cole pour fuir mon malheur ? la maison.
A la fin de ma quatri?me, je ne voyais plus Antoine. Cette relation ne
m'apportait plus grand-chose, et il voulait rencontrer mes parents, il
voulait qu'on ?officialise? notre relation, ce qui ?tait hors de
question. De m?me, mes jeux avec Emilie avaient cess?, car je n'avais
plus vraiment d'affaires de fille ? ma taille, car j'avais beaucoup
grossi. Le pire a ?t? lorsque ses parents ont d?m?nag? ? Caen, leurs
deux filles ?tant grandes maintenant. Je n'allais donc plus voir
beaucoup Emilie non plus.
Je passais des jours ? pleurer durant l'?t?, seul. Je n'ai jamais ?t?
aussi seul que cet ?t?-l?. Ma s?ur ne venait que pour prendre un go?ter
avec moi (elle y tenait),manger le soir, s'occuper de ma m?re, voir un
peu mon p?re. Je ne pouvais plus voir Antoine, et plus beaucoup Emilie.
Le bon c?t?, c'est que je faisais presque la m?me taille que ma m?re
maintenant. Lorsqu'elle dormait, ivre, je pouvais prendre des affaires
dans sa chambre. Je retrouvais des affaires de jeunesse qui ?taient ? ma
taille. Je fus ?tonn? ? quel point elle ?tait f?minine, jeune. On
n'imagine jamais ses parents jeunes, enfant. J'avais d?cid? que je
devais apprendre ? marcher avec des talons. Je choisis donc des sandales
? talons fins de 4 puis 6 cm de ma m?re, et je passais une bonne partie
de l'?t? avec, pr?t ? changer au dernier moment si quelqu'un arrivait.
J'?tais arriv? ? un niveau de guitare assez satisfaisant, mais j'avais
beaucoup de mal ? g?rer mes ongles qui devaient, selon mon professeur
?tre longs ? la main droite mais court ? la main gauche. Lorsque je
rongeais mes ongles, je ne le faisais g?n?ralement pas consciemment, je
rongeais les deux mains de fa?on ?quitable et d?mocratique. Mais si je
me for?ais ? ne pas le faire, comme j'?tais assez distrait, les deux
mains poussaient de la m?me fa?on. Ainsi, j'alternais des phases
d'ongles longs et courts, sur mes deux mains, au grand d?sespoir de mon
professeur.
Ma derni?re ann?e du coll?ge fut terrible. Emilie ?tait partie au lyc?e,
ses amis (donc, les miens), aussi. Je m'?tais s?par? de Sarah, et elle
me d?testait. Elle racontait ? tout le monde les secrets que j'avais pu
lui confier (heureusement rien sur Emilie), et m?me si elle ne savait
pas grand-chose, cela me d?truisait. Je m'enfermais dans mon corps, et
je grossissais. Lorsque j'?tais assis, je ne voyais m?me plus mon sexe.
Je ne voyais plus gu?re mon p?re, et ma m?re devenait lentement un
d?chet. Elise qui avait 18 ans, et allait passer le bac, s'occupait de
moi pour les choses essentielles de la vie. Elle s'orientait vers une
carri?re d'infirmi?re, avait un petit ami depuis un an, Matthieu, qui
semblait bien m'aimer. Il venait parfois dormir.
*******
A l'arriv?e dans mon lyc?e, ce fut un enfer. Beaucoup de gens se sont
moqu?s de moi. Parce que j'?tais ?de la campagne?. Parce que j'?tais
trop gros. Parce que j'?tais trop jeune. Et d'autant plus que malgr? mon
tr?s jeune ?ge (13 ans ? l'entr?e en seconde), j'?tais quand m?me un des
meilleurs de la classe. On m'appelait ?gros lolo? ? cause de ma poitrine
tombante que j'avais acquise avec mon poids. Ou parfois ?gros cul?. Ou
?gros tas?. Nous appelions un de mes camarades ainsi, au coll?ge. Je
n'avais jamais imagin? alors le mal que cela pouvait faire.
Elise ?tait en ?cole d'infirmi?re et je ne la voyais pas si souvent.
Elle tenait bizarrement toujours beaucoup ? ce qu'on se voit le plus
r?guli?rement possible, ? son nouvel appartement, o? nous prenions un
verre ou un chocolat. J'appr?ciais beaucoup son geste gentil. Depuis
qu'elle vivait de nouveau seule (elle s'?tait s?par?e de son copain),
j'allais parfois dormir chez elle le week-end. Elle m'avait achet? des
v?tements de fille ? ma taille. Elle m'a dit que la r?gle ?tait que chez
elle, je serais Charlotte, pour que Charlotte ne disparaisse pas
compl?tement de ma vie. Cela me remontait le moral. Me faire Charlotte
?tait devenu une routine. Tous les petits gestes de bijoux, de coiffure,
de se d?shabiller et s'habiller ?tait comme un rituel qui me
r?confortait. Je pense qu'Elise le savait et m'avait propos? ?a pour me
remonter le moral. Lorsque j'avais les ongles un peu plus longs, elle me
les passait au vernis rouge, rose, ou tout autre couleur. Avec Elise, je
d?couvris pour de bon le maquillage, fond de teint, mascara, ombre ?
paupi?re, eye-liner, etc.. Bref, tout afin de donner un look agr?able ?
mes yeux que je trouvais trop grand. Alors que cela ?tait plut?t un
d?faut chez un gar?on (cela me donnait perp?tuellement un air craintif,
curieux ou ?tonn?), chez une fille cela ?me donnait un air de petite
fille apeur?e qui veut qu'on la rassure?, comme disait ma s?ur. Elle me
fit aussi d?couvrir le fer ? friser et ? lisser, et fit des merveilles
de coiffure avec mes cheveux longs, qui s'?tendaient en g?n?ral jusqu'?
mi- dos voire plus une fois liss?s. Cela semblait vraiment lui plaire,
et cela me permettait de penser ? autre chose.
Ma m?re aimait me peigner ?galement, lorsqu'elle n'?tait pas ivre. Elle
me parlait beaucoup de sa jeunesse, o? bien qu'un peu grosse, elle
plaisait beaucoup aux hommes. Elle me disait ? quel point elle avait une
jolie poitrine, me montrait des photos d'elles jeunes, puis elle
pleurait. Elle pleurait en fait beaucoup. Mon p?re ?tait tr?s fuyant ?
cette ?poque, mais il semblait avoir rompu avec ses d?mons, et esp?rait
revenir avec ma m?re. Leur r?conciliation eut lieu vers la fin de mon
lyc?e. Jamais elle ne fit de commentaires sur mon poids, sur mon
physique. De mon c?t?, je n'osais pas lui parler de mon sexe que je
trouvais toujours trop petit.
J'en parlais par contre ? ma s?ur, un jour. Lorsqu'elle vit mon sexe,
elle eut un mouvement de surprise. Je lis dans ses yeux qu'il ?tait
VRAIMENT petit.
?C'est si terrible que ?a? Elise? Ne me mens pas!?
?Je ne sais pas...je n'en ai pas vu beaucoup, tu sais!?
?Tu as bien vu celui de Matthieu, non!
Elle rougit. Parler de ??a? n'?tait pas facile pour elle non plus.
?Oui...oui...?coute, je ne sais pas...je vais me renseigner, d'accord? Je vais
regarder dans mes manuels. Tu veux aller voir un docteur pour lui en
parler??
?Non! J'aurais trop honte! Mais je voudrais savoir si ?a va devenir
normal, quoi.?
?Oui, je comprends. Il n'y a pas d'urgence, de toute fa?on. Tu n'es pas
?malade?.Je regarde et je te tiens au courant! Promis!?
Elle ne m'en reparla que plusieurs mois apr?s.
J'arrivais enfin en premi?re. Plus personne ne se moquait vraiment de
moi, si ce n'est certains gars qui m'appelaient toujours ?gros lolo?.
Certains disaient que ?j'en avais plus que les filles?. Certains
disaient des choses tr?s vulgaires. On se moquait aussi du fait que je
n'avais pas beaucoup mu?, ma voix avait tout juste descendu en passant
du coll?ge au lyc?e.
Mais pourtant, ils ne mentaient pas. J'?tais vraiment gros, et gros de
partout. Je supposais que je devais tenir ?a de ma m?re, qui avait
toujours ?t? pleine de partout. Le pire ?tait les blagues sur ma bouche,
qui avait toujours ?t? tr?s charnue, ?une bouche ? embrasser?, comme
disaient les filles au coll?ge. Sauf que ?la bouche ? embrasser? ?tait
devenue ?la bouche ? pipe?. Le gras de mon corps se trouvait aussi sur
ma bouche, et j'avais, il est vrai, une grosse bouche. Je passais des
journ?es ? pincer ma bouche, ? serrer les fesses, ? cacher ma graisse
sous des v?tements tr?s amples. Je faisais 1m69, et manifestement, le
compteur s'?tait arr?t? pour moi. Je n'?tais pas large d'?paule. L?
encore, il semblait que Dame Nature m'avait jou? un mauvais tour. Pour
le reste j'?vitais de me regarder. Je savais que mes fesses ?taient
pleines de gras, car je devais prendre des pantalons beaucoup plus
larges que mes hauts, qui ?taient d?j? larges. Mes bras et jambes
?potel?es? ?taient juste gras. Je ne voulais pas qu'on voit mon corps.
Je ne voulais pas voir mon corps moi-m?me. Mon corps me d?goutait.
*******
A la fin de l'ann?e, je d?cidais de me reprendre en main, ? l'instar de
ma m?re qui ?tait en sevrage. Maigrir est beaucoup plus long que
grossir. Je d?cidais de faire de la musculation, de manger sainement, de
changer. Je voulais plaire, je voulais redevenir le bel ange que j'avais
?t?. Je savais que je ne serais jamais tr?s grand, ni tr?s fort. Mais
j'avais une tr?s belle peau, des yeux bleus des cheveux enviables. Bref,
j'avais de quoi plaire. M?me tr?s gros, j'arrivais parfois ? faire
briller les yeux des filles, avec mon humour, ma po?sie, mon
intelligence.
Je passais l'?t? ? essayer divers r?gime, mais je commen?ais ? perdre du
poids s?rieusement ? partir d'octobre.
C'est ? ce moment-l? qu'Elise est revenue pour me dire qu'elle avait
trouv? ce que j'avais.
?Gab', ?coute, je crois que tu as une anamorphose gynoco?dale retard?e,
au 2?me degr??.
Bien s?r, elle avait tout invent?. Mais je n'en savais rien. Internet
n'?tait encore que peu connu.
?C'est quoi ce truc? Jamais entendu parler!?
?Bof, c'est un truc compliqu?, j'ai lu pas mal de bouquins, mais je n'ai
que peu trouv? de choses l?-dessus. En gros, c'est un retard dans le
d?veloppement des caract?res sexuels secondaires, comme la taille des
?paules, des muscles, et du sexe provoqu? par une hormone retard.?
?Et...?a passe??
?Oui, oui, ?a passe! ?a devrait passer tout seul d'ici 1 ou 2 ans. C'est
quelque chose de tr?s rare, apparemment?
?Je dois aller voir un docteur??
?Non, je ne pense pas. Enfin, sauf si tu veux lui montrer ton pt'it
zizi!?
Je rougis. Elle reprit:
?Il existe sinon un moyen d'acc?l?rer le processus, mais bon, c'est une
technique exploratoire.?
?C'est risqu???
?Non, mais ?a n'est pas vendu sur le march?, bien que ce soit avec des
mol?cules assez simple?
?Tu saurais le faire??
? Oui, bien s?r! C'est ? base d'injection dans les testicules...?
?Oulha, non, surement pas! Oublie!?
?Ah ben oui, on a peur d'avoir mal aux coucougnettes, c'est ?a??
En me disant ?a elle ?clata de rire et me jeta le coussin du canap? sur
la t?te. Je la poursuivis en courant et nous riions. Je ne pouvais pas
courir trop vite, car elle m'avait fait essayer une de ses jupes longues
et je ne faisais que des petits pas.
?Bon, sinon, Gab', ?a te dit de faire une sortie avec mes copines en
?cole d'infirmi?re en boite? T'as 15 ans, maintenant, t'as le droit de
sortir non??
?Non...je suis beaucoup trop gros, j'aurais honte!?
?Mais non, t'es pas si terrible que ?a! Tu as d?j? perdu un peu, et
puis...?
?...et puis quoi??
?Ben, tu vas venir en Charlotte! Pour une fille, c'est beaucoup plus
habillable un peu de poignets d'amour!?
?Non, mais, t'es pas malade toi! C'est hors de question!?
Bien s?r, elle arriva ? me convaincre. Elle le faisait toujours. Je
finis par me retrancher sur le fait que je n'aurais rien ? me mettre.
Elle me r?torqua que cela signifiait que j'avais dit oui, et que le
reste n'?tait que logistique. Et elle avait raison.
Nous pass?mes une partie de l'apr?s-midi ? me chercher une tenue. Elle
avait r?ussi ? trouver un haut moulant qui ne me donnait pas l'air
d'avoir une baleine. Et elle m'acheta un soutien-gorge qui r?partissait
la graisse en la faisant ?remonter? dans la poitrine. Avec ?a, j'avais
l'air de faire du 95 D. En fait, je FAISAIS surement une taille
importante, mais je ne regardais pas, je ne mesurais pas. Je n'arrivais
pas ? y croire, lorsqu'elle me mit torse nu devant le miroir de la
cabine. Mes deux pectoraux pendaient de chaque c?t?, l'aur?ole
compl?tement dilat?e par le froid. J'?vitais de regarder mon corps, mais
je remarquais alors qu'elle agrafait le soutien-gorge que mes pectoraux
?taient vraiment gros, et pendaient. Elise le remarqua aussi.
?Dis donc, Gab', tu devrais peut ?tre penser ? porter un soutien
orthop?dique, pour ton dos. Ou au moins ? bander ta poitrine, sinon ?a
risque de d?former ton corps, et tu garderas des traces ? vie!?
?uhhhh??
Dans ma t?te, je pensais surtout ? ne rien regarder, ni ? ne rien
penser.
?Je vais te trouver ?a. Tu portes des bandages sur la poitrine, pour la
remonter, et pour le cacher. Beaucoup de gens en surpoids souffrent de
?a, et sans compter qu'on se moque de leurs ?seins?, alors que ce ne
sont que des pectoraux qui pendent. Tu pourras l'enlever quand tu auras
maigri! Parfois certains hommes ob?ses ont m?me des poitrines plus
importantes que celles des femmes, tu sais!?
?Ok! Je veux bien, s'il te plait!?
Je pronon?ais cette derni?re phrase ? toute vitesse, dans ma barbe
inexistante, je sentais mes joues en feu.
D?cidemment, Elise ?tait pleine de ressources, pensais-je, tout de m?me.
Une fois le haut d?collet? blanc ? pois enfil?, le ?truc? pour tricher,
le soutien-gorge pigeonnant, j'avais l'air canon. J'avais l'air d'une
fille bien en chair avec un d?collet? tr?s sexy. En bas, j'enfilais un
jean moulant dans lequel j'ai eu beaucoup de mal ? entrer, qui me
faisait (je trouvais) un gros cul, mais qui faisait (selon ma s?ur)
super mignon. Elle ajouta une ceinture large qui avait le double
avantage de masquer mon ventre, et soutenir ma poitrine. Avec des talons
ferm?s de 7 cm, cela me faisait dandiner et mal ? chaque pas, et j'avais
l'impression que mes hanches se baladaient de droite ? gauche. Je
n'avais jamais remarqu? avant que mes hanches ?taient assez larges, m?me
compte tenu de ma graisse. Cela expliquait surement la diff?rence de
taille entre le pantalon et le haut. Je remarquais d'ailleurs que je
faisais la m?me taille en haut et en bas pour femme (48 je crois me
souvenir) alors que j'?tais d?cal? en taille homme. Cela me fit beaucoup
r?fl?chir, plus tard.
Une fois ceci fait, nous nous pr?par?mes. Elle me fit lisser les
cheveux, puis les chauffa au fer ? friser, afin de donner des longues
boucles amples de star. Puis, elle me passa divers produits dedans pour
?que ?a tienne?, puis du rouge ? l?vre rouge et brillant. Elle
pr?tendait que j'avais une bouche ?rotique, une bouche magnifique, que
tout le monde voudrait embrasser. ?Une bouche ? pipe, ouais?, je lui
r?pondis. Elle fit la sourde oreille. Elle m'apprit qu'on ne devait pas
m?langer le maquillage des yeux et la bouche, pour ne pas ?faire pute?.
?Bon, sauf dans ce genre de soir?e, tu as le droit, un peu?. Elle ajouta
donc un peu de mascara. Je protestais. Elle r?torqua que c'?tait pour
que mes yeux aient l'air ?moins gros? puisqu'ils ?taient ?trop grands?.
Elle savait que c'?tait mon point faible. Je c?dais. Pourtant, j'aurais
pu savoir que le mascara produisait l'effet contraire. Mais j'?tais
comme sonn? par ce que j'avais vu de moi, j'avais capitul?.
Elle me fit ensuite les ongles au rouge puisqu'ils ?taient ?en long? en
ce moment, et me proposa deux boucles d'oreille cr?oles en clip. Je
n'aimais pas trop les boucles car les clips m'agressaient les oreilles
et me faisaient saigner. Mais - ajouta elle- ce n'?tait que pour la
soir?e. Et puis les boucles d'oreilles rondes mettraient en valeur mon
visage qui aurait l'air ainsi plus harmonieux.
Tout en s'occupant d'elle et de moi, elle semblait ne jamais s'arr?ter
de me faire des compliments, elle qui se trouvait plate, maigre et
laide. Elle me trouvait plantureuse, magnifique, et sexy. Je ne voulais
pas ?tre ?sexy?, lui r?pondis-je. Elle me dit que tout ce qui comptait,
c'est que je puisse m'?vader de mon corps, passer un bon moment sans
penser au lendemain, ? ce qu'on dirait de moi, et qu'enfin je prenne un
peu confiance en moi.
Elle avait raison.
*******
Avant de partir, elle prit deux verres de vin, et moi aussi. Elle disait
que c'?tait pour ?tre ? l'aise et aussi parce que la boisson l?-bas
?tait tr?s ch?re. Elle prit son portefeuille et me dit que si je voulais
prendre quelque chose, je pouvais lui demander.
Nous part?mes ? pied, jusqu'au bar o? attendaient ses copines et
copains. J'avais assez chaud au visage ? cause du vin, mais je me
sentais bien. Elise me pr?senta comme sa cousine, Charlotte. Ses copines
et copains (qui ?taient en m?decine, pour la plupart) ?taient tr?s
gentils avec moi, mais je ne comprenais rien ? leurs conversations
m?dicales. Ils buvaient tous une vodka orange, et sous la pression
amicale d'Elise, j'en pris une aussi. Ma carcasse me permettait
d'encaisser de l'alcool, mais je ne buvais jamais, si bien que j'?tais
assez ivre apr?s ?a. Je riais beaucoup, et j'attirais l'attention sur
moi. J'aimais ?a. Les copines d'Elise se moquaient un peu de moi en
disant que j'?tais bourr?e, mais certains de ses copains se penchaient
pour regarder mon d?collet? et semblaient hypnotis?s par ma bouche.
J'exultais, je plaisais! Je me sentais comme un roi, comme une reine.
Tout le monde partit aux toilettes avant de partir, et comme je
remarquais un verre ? moiti? plein qui restait, avant de partir, je le
pris discr?tement et le vidais d'un train. C'?tait fort. J'?tais une
reine pour de bon, rien ne m'emp?cherait d'?tre une d?esse! Ou un dieu.
La boite ?tait tr?s grande, et bruyante. En me regardant dans la glace,
je fus excit? par ma propre vision, mes yeux brillants. J'aurais ?t?
amoureux d'une telle fille, et m?me si je n'avais pas d'?rection, je
sentais que mon sexe fr?tillait. La musique ?tait sympa, mais je perdis
rapidement une partie du groupe des filles dont Elise. Je me dirigeais
donc sur la piste de danse et dansais seule sur la musique. Je dansais
seule assez longtemps, et j'avais assez chaud. Je repassais donc aux
toilettes pour me remaquiller, et me rafraichir, et rajuster mon rouge ?
l?vre.
En sortant, je tombais sur un des copains d'Elise qui semblait lui aussi
chercher le groupe. Nous devions ?tre tr?s proche et crier pour nous
comprendre.
?Salut! ?a va?
?Ouais, ?a va! Et toi??
?Super! Tu danses??
?Je fais quoi ? ton avis!?
Je le regardais et ?clatais de rire. Ma t?te tournait et il ?tait assez
proche. Il ?tait brun, assez fort, et avec les yeux marrons. Assez
banal, en somme. Mais j'?tais parti pour rire.
?Tu veux prendre un verre??
?Quoi??
?Je t'invite prendre un verre, ?a te dit? Tu bois du champagne??
?T'es cool dis donc toi!?
Le champa