Chapitre 1 : La pi?ce au bout de l'escalier
Samedi 1er Mars. Prologue.
?a n'?tait plus possible.
?Hugo, repose ceci imm?diatement, et calme toi.?
Cela faisait presque 10 fois qu'elle devait r?p?ter cette phrase.
?Je ne veux pas ranger ma chambre! C'est HORS DE QUESTION! JE NE VEUX
PLUS T'OBEIR! GROSSE PUTE!?
Hugo avait 12 ans. Ses yeux verts lan?aient des ?tincelles, et ses
jolies boucles n'en ?taient pas moins venimeuses. Il causait grand
soucis malgr? son jeune ?ge. Col?rique, capricieux, agressif, voil? ce
qu'il ?tait.
?Hugo, on peut discuter de tout, mais pas dans la cuisine, et PAS TANT
QUE TU AURAS CE COUTEAU DANS LA MAIN.?
Que pouvait faire Sabine? Appeler la police? Pour leur dire quoi? Que
son enfant de 12 ans la mena?ait, dans sa propre maison, avec un couteau
? viande? En tant que m?re c?libataire, elle perdrait la garde de son
enfant, ou elle aurait ? subir les perp?tuels regards et jugements des
gens, de l'?cole, de la justice...
Restait Hugo, face ? elle, son couteau, son air furieux. Ce sale petit
con qu'elle avait ?lev? ?tait de plus en plus intenable.
?Bon, Hugo, je vais m'approcher lentement de toi, et quand je serais
devant toi, tu me donneras le couteau, d'accord??
Il fallait tenter le tout pour le tout.
Sabine s'approcha, pas ? pas. Ce petit con allait c?der. Apr?s ?a,
c'?tait direct la pension, elle se le jurait.
?Hugo, s'il te plait, ne fais rien de stupide je suis ta mamaaa.....?
Il l'avait fait. Son regard s'?carquilla un instant, d'horreur,
d'incompr?hension, de d?fiance, et, peut-?tre, de regret.
******
Vendredi 6er Mars. Prologue - 2?me partie.
Sabine avait eu le temps de prendre sa d?cision. Le couteau n'avait
heureusement pas p?n?tr? loin, mais ce petit con avait bien vis?. Avec ?
peine plus de force, elle ne serait plus l?. Cela ne pouvait plus durer.
A pr?sent il ?tait l?, dans la chambre, tout larmoyant, plein de
regrets. Mais jusqu'? quand?
- Hugo?
- Ecoute-moi bien Hugo, il va falloir que tu vives sans maman pendant
quelques temps, d'accord?
- Mais....vraiment? Je vais ?tre sage je te promets!
Il se mit ? pleurer doucement. En le regardant, elle sentit son c?ur se
gonfler. Il ?tait si dur de se s?parer de son enfant. Il pouvait ?tre si
mignon.
- Non Hugo. Tu le sais.
Elle refoula les larmes qui montaient lentement ? ses yeux.
- Tu le sais...nous allons vivre s?par?ment, quelques temps, et si tu es
sage, tu reviendras ? la maison. Mais maman a besoin d'?tre seule
quelques temps, d'accord?
- Mais qu'est-ce que je veux devenir sans toi?
Il semblait sinc?re. Pauvre enfant. Elle se mit ? pleurer, elle aussi ;
son gar?on la rejoint, et ils rest?rent quelques minutes ensemble. Elle
prit une longue respiration et d?bita la suite.
- Hugo, il faut que tu sois fort, toi aussi. Ecoute : ma grande s?ur, ta
tante, Fran?oise, a accept? de te prendre quelques temps. Elle va
arriver tout de suite et tu vas partir avec elle. Tu vas aller vivre ?
la campagne, ?a va te faire du bien, tu pourras te d?fouler, grandir.
Elle s'occupera bien de toi, je reviendrai te voir de temps en temps.
D'accord?
Sa s?ur Fran?oise ?tait une femme s?v?re. Hugo la d?testait depuis tout
petit, et elle n'avait jamais c?d? ? ses caprices. Depuis la mort de son
p?re, Sabine avait petit ? petit perdu sa force, alors que son enfant
?tait devenu de plus en plus dur. Heureusement, Fran?oise avait toujours
?t? l? pour elle, et c'?tait sa s?ur, ou la pension pour mineur.
Pendant quelques instants, Hugo resta bouche-b?e. Puis son expression
prit sa teinte habituelle, de furie et de cruaut?. Il explosa :
?- QUOI? TU VEUX QUE J'AILLE VIVRE CHEZ CETTE SORCIERE? C'EST UNE
SALOPE! QU'ELLE CREVE! NONNN!?
Sabine entendit des pas dans le couloir, surement le corps m?dical qui
avait entendu. Son enfant, son Hugo, ?tait l?, furieux, tapant du pied
dans le lit, dans les chaises, hurlant ? tue-t?te.
Soudain, ELLE entra. Sabine tourna la t?te, douloureusement, et sourit ?
sa grande s?ur. Fran?oise. Elle se tenait droite, les cheveux gris, ses
yeux ambr?s centr?s sur son fils, qui soudain fit silence.
?Tais-toi, maintenant!?
Hugo se tenait l?, d'un air de d?fi, son coin d'?il riv? sur sa m?re. Il
s'approcha de sa tante, se tint devant elle fermement, et hurla :
? NONNNNNNNNNNglup?
Son cri fut arr?t?, magistralement, par une claque, tout aussi rapide
qu'inattendue. Soudain, Hugo se tut. Fran?oise reprit :
- Bon, je vois que tout va toujours aussi bien. Hugo, tu prends tes
affaires, j'ai d?j? tes valises dans le coffre, nous partons maintenant.
Tu veux dire au revoir ? ta m?re?
- Non.
- Tr?s bien. Nous partons. Je t'appelle bient?t, Sabine.
- Non.
Elle se tourna aussi rapidement qu'elle ?tait venu pour repartir dans le
couloir. Hugo se tenait toujours au milieu de la pi?ce, interdit. Dix
secondes plus tard, Fran?oise ?tait ? nouveau ? l'entr?e.
?Tu vas venir, sale petit con? J'ai pas que ?a ? faire.? Elle s'approcha
alors de lui, et lui administra une 2?me gifle puis le prit par le
poignet et s'?loigna. Hugo paraissait bless?, humili?.
Sabine voulu un instant se relever, dire quelque chose, demander ? sa
s?ur d'?tre gentille, d'?tre douce, d'?tre compr?hensive, de ne pas
maltraiter son fils. Mais, comme un rappel, sa blessure la lan?a, et,
impuissante, elle retomba, vid?e, sur son lit.
*********
Samedi 6 mars. Plus tard.
La voiture avalait les kilom?tres dans un silence absolu. Hugo, seul, ?
l'arri?re, ruminait tous les meurtres possibles et tous les synonymes du
verbe souffrir pour sa tante.
Fran?oise avait bien pr?vu les choses. Femme de t?te, ais?e, elle avait
h?rit? d'une tr?s grande exploitation agricole de son feu-mari. Elle
vivait en chef d'exploitation, n'ayant pas besoin de travailler pour
vivre, mais ne rechignant pas ? aider au v?lage en pleine nuit. Elle
aussi avait eu des enfants. Mais c'?tait avant.
Elle soupira silencieusement.
Lorsqu'elle ?tait plus jeune, son mari, le fr?re du mari de Sabine,
?tait mort, dans un accident. Ses deux filles, aussi. Elles avaient 17
et 15 ans. Le choc avait ?t? tr?s rude, mais son caract?re tr?s fort
avait fini par reprendre le dessus. Ce n'?tait qu'il y a 6 ans. Mais cet
accident n'avait pas seulement ravi son mari et ses belles filles. Il
avait aussi tu? le p?re d'Hugo, son fr?re. Depuis ce jour, Hugo, qui
avait r?ussi on ne sait pas comment ? l'apprendre, vouait une haine
f?roce ? Fran?oise, car il ?tait persuad? que c'?tait ? cause de son
mari, ? ELLE, que son p?re ? LUI ?tait mort. M?me s'il se trompait - le
compte rendu de l'accident ?tait clair sur le fait que son mari n'avait
aucune responsabilit? dans l'accident, et qu'il n'aurait pas pu ?viter
le sanglier, et le camion en face - la plaie, restait, b?ante, entre eux
deux.
Apr?s plusieurs heures d'autoroute, puis 200 km de morne paysage, elle
se gara, au milieu de nulle part, et se retourna vers Hugo, ? l'arri?re.
Elle rompit finalement le silence :
- Bon, Hugo, ?coute-moi bien, je ne vais pas le r?p?ter. Je vais ?tre
tr?s claire. Ton cas a ?t? beaucoup discut?, y compris ? l'h?pital, et
beaucoup ?taient pour te placer dans une pension, ou dans un h?pital.
- Mais je...
- NE ME COUPE PAS.
- C'est ta m?re qui a insist? pour qu'on te donne une chance. C'est ?
elle que tu dois de ne pas ?tre enferm? aujourd'hui. Je n'?tais pas
personnellement pour, mais tu sais que je ferai tout pour ta m?re. Cela
signifie aussi que, si tu d?sob?is, si tu blesses quelqu'un, si tu
cherches ? t'?chapper, il n'y aura plus rien pour te prot?ger.
-Mais je...
Elle lui administra une gifle, en revers.
-Tu vas ?galement apprendre ? ne pas couper les adultes. Tu as compris
ce que ?a signifie? Tu t'installeras dans la petite maison ind?pendante.
Le m?nage sera fait pour certaines parties par mon personnel, ?
l'ext?rieur, mais le reste va rester ? ta charge. J'ai obtenu de te
faire classe moi-m?me, j'ai ?t? enseignante avant d'?pouser Bernard. Je
serais intransigeante pour que tu fasses ta part. Des questions?
Hugo se sentit soudain tr?s petit, tr?s jeune, tr?s seul.
-Que...que devrais-je faire?
-Ah, voil? une bonne question! Tu as voulu jouer au petit homme, au
violent, il faut donc que tu apprennes ? assumer. Je pense que le grand
air te fera beaucoup de bien. Tu devras chaque jour aller te chercher
l'eau ? la rivi?re, tu devras faire le m?nage. Pour la nourriture, tu
viendras manger ? la ferme avec moi, mais si je ne suis pas l?, tu
devras te d?brouiller. Je t'apprendrai certains plats pour que tu
puisses t'entra?ner. Tu devras aussi, parfois m'accompagner sur le
terrain, pour que tu voies la r?alit? de la vie, du travail et peut ?tre
que tu aides. Ne t'inqui?te pas, c'est tr?s sain, c'est une ferme bio,
tu ne mourras pas intoxiqu? par des produits chimiques.
-C'est tout?
Hugo n'en croyait pas sa veine. Comme punition, il obtenait ce dont il
avait toujours r?v?! L'ind?pendance!
-Oui, c'est tout! A quoi pensais-tu? Je ne suis pas un bourreau! Je suis
ta tante! Mais ne r?ve pas! Tu verras que tout ceci est tr?s fatigant.
Bon, on est presque arriv?s, tiens-toi tranquille ? pr?sent.
La voiture reprit son chemin, dans un silence qui parut ? Hugo bien
moins lourd.
La maison apparut enfin, dans une brume l?g?re. La ?ferme? ?tait une
grande b?tisse, maison de ma?tre, sur 3 ?tages. Elle devait ?tre
immense, et tout le personnel de la ferme y logeait, dans les ailes,
familles comprises. C'?tait plut?t inhabituel pour le monde moderne,
mais Fran?oise ?tait tr?s g?n?reuse sur le loyer, et, finalement, tout
le monde y trouvait son compte. Au bout d'un sentier, un bois, une
petite maisonnette, et la rivi?re qui faisait un coude en cet endroit.
Hugo se sentait comme en vacances. Plus loin, le squelette d'une
industrie se dessinait, dans la fum?e bleut?e.
Apr?s quelques minutes de pr?sentation, puis d'am?nagement, Hugo se
trouva enfin seul, dans sa chambre. Il avait une grande chambre ?
l'?tage, des armoires immenses partout, et, au rez-de-chauss?e, une
pi?ce ? jouer, une petite t?l?vision, quelques ?quipements de sport, une
guitare ?lectrique (!), des livres de toute sorte. Fran?oise semblait
avoir achet? un peu au hasard, sans conna?tre ses go?ts, en imaginant ce
qui pouvait motiver un enfant de 12 ans.
Il ?tait enchant?.
*********
Mars.
Pendant une semaine, Hugo eut la vie dure. Fran?oise avait d? partir
n?gocier pour Hugo-ne-savait-pas-quoi. De plus, il ?tait tomb? malade
d?s le premier jour, vomissait et avait des vertiges en permanence. Il
avait quand m?me d? aller chercher son eau ? la rivi?re, la faire
r?chauffer, se laver, se tra?ner jusqu'? la ferme, laver ?sa? maison,
aider aux travaux dans la maison. Au final, il ?tait ?puis?, malade, et
commen?ait ? se demander si tout ceci n'?tait finalement pas une
punition comme il le craignait. Vers la fin mars, toutefois, il commen?a
? aller mieux, et profita du beau temps pour se promener, le long du
(vraiment grand) domaine, qui longeait la rivi?re sur presque un
kilom?tre, et autant en largeur. Il profitait en fait un maximum de sa
libert?, ?Plus de 100 hectares?, lui avait confi?, admirative, Emma, la
domestique de la maison, avec qui il ?tait devenu ami. Et Fran?oise
?tait une femme d'affaire qui, selon elle, avait d'autres actifs
ailleurs dans la r?gion, et elle faisait r?guli?rement des tours
d'inspection de ses autres fermes. Hugo avait vraiment gagn? au change,
oui, vraiment. Il avait appris ?galement que la grande usine qu'il
voyait de chez lui, au loin, ?tait une entreprise pharmaceutique qui
employait beaucoup de gens, y compris une des conjointes d'un des
employ?s de la ferme.
Le retour de Fran?oise ne se fit finalement qu'? la toute fin mars, et
elle le convoqua pour diner. Hugo ?tait un peu effray?. Il ne savait pas
comment se comporter, il n'?tait pour ainsi dire jamais venu dans la
grande maison, mais uniquement dans la cour. Emma lui avait racont? la
d?coration, la grande table, la chemin?e, mais aussi la moiti? de la
maison, ferm?e ? clef. Les effectifs de la ferme avaient beaucoup
diminu? avec la m?canisation, et il restait beaucoup de place, ici.
Fran?oise ?tait v?tue d'un tailleur pantalon, gris perle, tr?s
classique, mais d'une grande classe. Elle effrayait un peu Hugo, qui
?tait encore bl?me de sa maladie.
- Alors Hugo, comment se passent tes premiers jours avec nous?
- B....bien?
- Parle, dis-moi, je ne vais pas te manger. As-tu respect? tes
engagements?
- Euh...oui, oui...oui, tatie.
- Ne m'appelle pas comme ?a! Ca fait la m?chante mar?tre du conte de
f?e! Tu sais, ? partir de lundi, nous reprenons l'?cole, je compte
m'occuper de toi s?rieusement, d'autant que l'Education Nationale nous
surveille de pr?s. Je me suis engag?e pour toi! Bon, tu veux savoir ce
que je te ram?ne?
- Oui!!!!
Emma arriva par la porte de derri?re, avec un petit panier, recouvert
d'une serviette. Un jeune beagle l'air d?sorient? et charmant, poussait
son museau de chiot.
- Regarde, je t'ai trouv? un petit chien! C'est un de mes employ?s qui a
eu une port?e et ne savait pas quoi en faire. Comment veux-tu l'appeler?
- Euh....je sais pas!
- Mais il faut lui trouver un nom! Regarde le bien, il te plait?
- Hector!
- Hector? Quel dr?le de nom! Tu es s?r?
- Oui! C'est le nom du chien dans mon dessin anim?!
- Oui...oui, mais, il a l'air bien plus petit! Tu es s?r, alors, Hector?
- Oui!
Hugo ne le l?cha pas de la soir?e. Fran?oise avait des choses ? r?gler
pour son retour, et il s'?tait promen? dans la maison en compagnie de
son nouvel ami fr?tillant. Le rez-de-chauss?e comprenait toutes les
pi?ces qu'il connaissait d?j?, et il avait tent? de monter au premier
?tage. Comme lui avait dit Emma, de nombreuses portes ?taient ferm?es ?
clef, et, d'ailleurs, c'est en arrivant devant une qu'Hugo tomba nez ?
nez, dans l'obscurit?, avec sa tante, qui le cherchait. Elle semblait
?trange, et titubait l?g?rement. Il se recroquevilla instinctivement,
comme s'il sentait qu'il avait fait quelque chose de mal ou qu'il
risquait quelque chose.
-Te voil? enfin? Je te cherchais partout! Qu'est-ce que tu fais ici?
- Je...je me suis perdu, je me promenais pour faire visiter la maison ?
Hector!
- Tu sais que tu n'as pas le droit d'aller ici!
- Mais qu'est-ce qu'il y a?
- Oh rien, une partie de la maison que j'ai ferm?e, pour ne pas avoir ?
la chauffer. Mais c'est habitable, c'est juste que...enfin bref, tu n'as
rien ? y faire! Par contre, tu viens maintenant avec moi, nous allons
visiter TA maison.
Sur le chemin, Hugo se demanda si, tout de m?me, il n'avait peut-?tre
pas un peu trop profit? de sa libert? ces derniers jours. Sa tante
sentait l'alcool. Lui, la peur.
La maison ?tait dans un capharna?m extraordinaire. Les livres ?taient
partout, l'odeur du renferm?, de la nourriture avait gliss? par terre et
sentait le moisi.
- C'est comme ?a que tu prends soin de la maison? TU TE MOQUES DE MOI!?
Hugo sentit monter sa col?re :
- C'est chez moi maintenant! Tu me parles pas comme ?a!
- QUOI!
Elle retrouvait le petit salop qu'elle pensait bien avoir laiss?. Il la
regardait d'un air effront?, m?chant, sans peur, agressif, insoumis.
Elle s'approcha de lui, lui aligna une, deux, trois gifles, il eut
soudain un haut-le-c?ur, et lui vomit dessus. Elle le prit alors et lui
fessa les fesses, dix, vingt, trente fois, de mani?re brutale et sans
s'arr?ter. Ses hurlements devaient s'entendre ? l'autre bout du sentier
car Emma finit par arriver, haletante, suppliant Fran?oise de cesser.
Elle se leva, enfin, et lui dit ?Demain, au salon, 9 heures pour
commencer les cours. Sois ? l'heure. Demain soir, tu nettoieras la merde
que tu as laiss?, jusqu'? la derni?re goutte, jusqu'au dernier morceau
de frite, jusqu'? ce que ce soit propre. C'EST COMPRIS??.
Hugo sanglotait, sans fin, ? chaudes larmes, trop fort pour pouvoir
r?pondre. Fran?ois glissa son pied sous son corps, et le retourna d'un
coup sec. Elle hurla ?C'EST COMPRIS, MAINTENANT??.
Il finit par l?cher un ?oui?, minuscule, terroris?. Il sentait la
chaleur de son pantalon, ? l'endroit o? il s'?tait urin? dessus. Il
sentait la brulure de l'humiliation, le go?t et l'odeur du vomi, en lui,
sous lui, autour de lui, sur ses cheveux sur lesquels reposait sa t?te.
Il se sentait haineux, minable, atrocement minuscule et malade. Il
voulait revoir sa m?re et la ha?ssait de l'avoir laiss? ici. Il se
sentait malade d'y avoir cru. Il se sentait honteux de ne pas avoir
respect? son engagement. Sur la table, beaucoup plus tard, il vit
qu'Emma avait laiss? un comprim? ?pour ta maladie?, une boite de
m?dicament anti-naus?eux, ? c?t? du broc, un balai et des produits
m?nagers, en ?vidence.
*********
Le 18 Juin.
Cela faisait maintenant 3 mois qu'Hugo ?tait chez sa tante. L'inspecteur
de l'?ducation ?tait pass?, et semblait tr?s satisfait des r?sultats
scolaires de l'enfant, en nette progression sur le plan de la
concentration comparativement ? l'?poque o? il ?tait ? l'?cole. Il lui
posa des questions, en priv?, sur la mani?re dont sa tante se conduisait
envers lui, et, malgr? les coups qu'il continuait ? recevoir
r?guli?rement chaque semaine ou chaque jour, surtout lorsque sa tante
avait bu, il n'osa rien dire de peur des cons?quences.
Il se sentait mieux depuis quelques temps. Alors que les premi?res
semaines, sa naus?e ne cessait pas il avait fini par enfin se sentir ?
l'aise chez lui. Il se d?pensait beaucoup, sa tante ?tait tr?s exigeante
avec lui, mais il essayait toujours d'en faire plus pour ?viter les
coups, et, parfois, il parvenait ? lui arracher un sourire. Lors de ses
visites, il ?tait parvenu ? visiter presque toute la maison ?autoris?e?,
mais cherchait un moyen de s'introduire dans l'autre partie. Il lui
semblait qu'il fallait absolument trouver un moyen d'entrer l?-dedans, ?
tout prix, quoiqu'il lui en co?te. Il voyait, parfois, de sa petite
maison, que la lumi?re s'allumait l?-bas, et il savait que sa tante lui
cachait quelque chose.
La corv?e d'eau, de bois, de m?nage, ?tait tr?s pesante, car il n'?tait
pas muscl?. Et bien qu'il esp?rait le contraire, 3 mois plus tard, il ne
semblait toujours pas l'?tre davantage. Sa m?re lui manquait.
Le d?clic se produisit le 18 juin. Ce jour-l?, comme d'habitude, Hugo se
leva t?t, alla chercher l'eau ? la rivi?re, pr?para son caf? avec (il
avait eu le droit d'en prendre, pour la premi?re fois, pour ses 13
ans!), remplit sa petite bouteille pour le cours, rangea la vaisselle,
s'habilla, prit ses livres et se rendit sur le petit sentier vers la
ferme, Hector sur les talons. Il avait bien travaill? sa le?on le soir
pr?c?dent, et esp?rer ?pater sa tante, et, peut-?tre m?riter une boule
de glace ?faite maison? par Emma, cet apr?s-midi apr?s la classe. Il
esp?rait aussi pouvoir rencontrer les enfants d'Emma qu'il n'avait
crois? que quelques fois et qui ?taient plus ?g?s que lui pendant les
vacances.
La salle de classe ?tait vide. Pas de Fran?oise. Il l'appela ? voix
haute, plusieurs fois, sans r?ponse. L'escalier majestueux ?tait comme
un appel. Il monta sans un bruit. La double porte ?tait ouverte. Cette
fameuse double porte. A l'int?rieur, des draps blancs ?taient tendus,
sur la plupart des meubles. Il y avait quelques photos, sur l'armoire.
Fran?oise plus jeune, en compagnie d'un homme qui ressemblait ? son
p?re. Et deux jeunes enfants, dont l'une ressemblait ? Hugo. Il sentait
l'excitation, la peur du danger, mais il fallait qu'il en voit plus. Il
n'aurait surement pas d'autres occasions. Il parcourut le reste de la
pi?ce, et par terre, il trouva une autre photo, d'une autre sc?ne, des
m?mes personnages. Il la cacha dans son sac de classe, et continua son
exploration.
Cette premi?re pi?ce communiquait sur une autre, plus sombre. Fran?oise
?tait allong?e l?, et ronflait doucement, une bouteille ? c?t? d'elle.
Elle avait l'air d?faite.
Hugo n'eut pas le temps de p?n?trer plus avant qu'Hector, se mit ?
aboyer, et se jeta sur le lit pour faire f?te ? Fran?oise.
Hugo se congela sur place, et, tandis que Fran?oise se relevait et le
fixait de son regard mal assur?, il fit demi-tour et s'enfuit ? toute
vitesse. Il entendait les cris de sa tante lui disant de venir
imm?diatement, tandis qu'haletant il cherchait quelque part o? se
cacher. Il ne savait pas ce qu'il risquait, mais il ne valait mieux pas
le savoir. Il sortit de la maison, en ligne droite, jusqu'? la sienne,
puis se barricada du mieux qu'il put, et, enfin, se cacha sous son lit.
Il tremblait de tous ses membres, jusqu'? ce que Fran?oise frappe,
attende, puis entre par la porte-fen?tre de la cuisine qu'il avait
laiss? ouverte par m?garde.
La peur le t?tanisait, il ?tait incapable de rien d'autre que trembler
sur ses membres.
Soudain, Fran?oise lui apparut, t?te gris?e proche de lui, yeux jaunes
au regard fixe. Il hurla un temps infini.
Elle lui tendit finalement la main. ?Viens?, dit-elle doucement. ?Viens,
je ne vais pas te faire de mal, il faut que je te parle, viens
t'asseoir?.
Elle se recula ensuite, et s'assit. Apr?s un long moment ? reprendre ses
esprits, il finit par sortir et s'assit avec elle.
?Je dois te dire quelque chose, Hugo. Je bois. Tu le sais. J'essaye de
moins boire depuis que tu es ici, mais parfois, c'est dur. Tu sais, ton
oncle - mon mari - Bernard, il me manque beaucoup.?
Elle prit une longue inspiration.
? La partie de la maison que j'ai ferm?, c'est l? o? nous vivions,
avant...avant que tout ceci n'arrive. Parfois j'y vais, pour me souvenir,
pour ne pas oublier. C'est pour ?a que je ne veux pas que tu y ailles.
Cela m'appartient, tu comprends??
Hugo acquies?a silencieusement.
?Je suis all? voir quelqu'un, pour faire une cure, pour revivre, pour
passer au-del?. Mais c'est dur. Ne crois pas que je ne t'appr?cie pas.
Tu es un petit con mal ?lev?, mais je sais que tu peux grandir. Hein??
Hugo ne dit toujours rien. Il sentait comme une ?p?e sur sa nuque, s'il
disait quelque chose de mal ou s'il ne disait rien.
?Tu ne dis rien? Tant pis. Ecoute, j'ai aussi une grande nouvelle ?
t'annoncer. Ta m?re vient te voir, la semaine prochaine. Je voulais te
le dire hier et puis...et puis... je n'ai pas pu.? Elle termina sa phrase
dans un soupir.
Hugo vit une larme perler au coin de son ?il. Il fut saisi d'un
mouvement de tendresse, mais il ?tait encore trop terrifi? pour
l'approcher. Il resta, interdit, l?.
?Ma m?re?...?
?Oui, Sabine! Elle a d?cid? de venir, et te reprendre si tu le
souhaites, au vu de tes r?sultats et de ton calme, ici. Nous allons
partir en vacances, tous les trois, et si ?a se passe bien, tu rentreras
avec elle. Tu es d'accord? Je vois bien que je ne suis pas bonne pour
toi.?
Hugo ne savait que penser. Il d?testait Fran?oise, il ?tait terrifi?,
mais sa vie d'avant? Il ne parvenait m?me plus ? se rappeler quels
?taient ses rapports avec sa m?re. Le temps passait tellement vite...d'un
autre c?t?, une semaine de vacance, sans les corv?es, sans le m?nage, il
?tait ravi.
?Je peux amener Hector??
Elle eut un sourire gentil. Elle ressemblait un peu ? sa m?re, quand
elle souriait.
?Oui, bien s?r! Il est ? toi, tu sais, maintenant??
*********
Ils partirent le lendemain matin, tr?s t?t, en voiture. La route ?tait
longue, mais Hugo se tenait tr?s sage, il se sentait tr?s excit?, mais
en m?me temps d??u de n'avoir pu rencontrer les enfants d'Emma, ou les
autres enfants de l'exploitation, ou continuer l'exploration de la
maison. Il avait regard? la photo de ses cousines (doublement cousines!)
toute la soir?e, et il se sentait triste pour elles, elles avaient l'air
gentille, surtout la plus jeune (derri?re la photo ?tait ?crit Sophie,
17 ans, et Madeleine, 15 ans). M?me Fran?oise avait l'air gentil sur la
photo. C'?tait il y a presque 6 ans. Il ne s'en souvenait pas. Il se
souvenait de son p?re. Il avait presque 7 ans quand il y eut
l'accident.
L'Accident. L'?v?nement tabou que, ni sa m?re ni sa tante ne voulait
jamais ?voquer.
Sa m?re avait l'air tr?s anxieuse, et pr?te ? pleurer en retrouvant son
fils. Elle semblait d?chir?e par la peur qu'il ne l'aime plus. Elle le
serra fortement, et Hugo se sentit tr?s bien, avec elle, soudain. Il se
sentait calme, doux. Il voulait l'aimer comme elle l'aimait, tendrement.
Physiquement, elle lui fit des compliments. Il avait moins l'air d'un
petit ca?d, le r?gime ?? la ferme? semblait lui avoir profit?, et il
avait des petites joues et un petit bidon. Il ?tait ?mignon?, en fait.
Moins petit homme dur, et plus, grand gar?on.
Ils pass?rent la journ?e au bord de la mer, dans la chaleur et l'immense
soleil de l'?t?.
Le lendemain, Hugo se sentit fi?vreux, malade, et de mauvaise humeur. Il
avait de nouveau envie de vomir.
Le surlendemain, Hugo vomit le matin, r?pondit m?chamment ? Fran?oise
qui se retint de le gifler, et ne voulut pas sortir de la journ?e. Elles
l'amen?rent chez le m?decin, qui lui prescrit un m?dicament contre la
naus?e. Mais, malgr? ?a, il se sentait fatigu?, et ?nerv?.
Au bout de quatre jours, l'ambiance ?tait ? couteau tir?, Sabine ?tait
horriblement triste, et malgr? l'affection que tentait de lui donner son
fils, elle n'?tait plus s?re du tout de penser qu'il ?tait pr?t ?
revenir. Elle fut n?anmoins tr?s contente de voir ses r?sultats et le
rapport de l'inspecteur ainsi que les notes qu'avaient laiss? Emma ? son
attention pour lui dire que son petit gar?on ?tait vraiment mignon.
Au dernier jour, ce qui devait arriver arriva. Hugo l?cha un mot de trop
devant sa m?re, Fran?oise le gifla, il lui r?pliqua qu'elle aurait d?
se trouver dans cette voiture ce jour-l? pour crever avec les autres. Il
y eu un moment de blanc total entre les trois. Sabine se leva, tr?s
p?le, prit ses affaires, et dit avant de partir ?je reviendrai te
prendre lorsque l'ann?e sera ?coul?e, Hugo. Sois gentil avec ta tante.?
Fran?oise, elle, ne dit rien. Hugo non plus.
Il ne dit rien non plus lorsque, sur un sentier de for?t au milieu du
trajet, elle s'arr?ta pour le frapper copieusement.
Il ne dit rien non plus, lorsqu'elle soigna sa l?vre fendue.
Il ne dit en fait rien jusqu'? ce que, le soir, il rentra seul dans sa
maison, son chien secouant la queue de retrouver sa niche, et sortant la
photo de sa cousine de sa poche et la posant dans le cadre ? c?t? de son
lit et l?cha ?Enfin chez moi?.
*********
1er Juillet
Etrangement, Fran?oise ne lui tint pas rigueur. Il commen?ait ?
comprendre comment elle fonctionnait. La punition du mal succ?dait
toujours, et irr?m?diablement, au mal en lui-m?me. Mais elle ne lui
reprochait jamais des choses pour lesquelles elle l'avait d?j? puni. Les
marques de bleus qu'il avait se confondaient, certains jaunes, d'autres
vertes, d'autres encore rouges. Si on enlevait la douleur sur le moment
et l'humiliation, elle ne le frappait jamais tr?s fort en r?alit?. Mais
c'?tait encore une humiliation.
Son retour ? la ferme le rendait heureux. Les enfants d'Emma ?taient
enfin en vacances, et il put les rencontrer. Jonathan (dit ?Jo?) et
Jean-Baptiste (?JB?) ?taient de solides gaillards, de 14 et 16 ans. Le
plus grand avait une voix de basse impressionnante. Lorsqu'ils se
rencontr?rent pour la premi?re fois, ils devaient partir ? la chasse
(braconnage, en r?alit?, mais Hugo ne le savait pas). Et ils propos?rent
d'initier Hugo. M?me s'il avait un peu peur, il accepta.
Depuis le d?but de l'?t? et des grandes chaleurs, il transpirait
beaucoup dans sa petite maison qui prenait le soleil, et devait boire
toute la journ?e. Il constatait aussi que ses naus?es ?taient plus
fortes en p?riode de chaleur, et donc il restait autant que possible au
frais. Une promenade dans les bois n'?tait donc pas pour lui d?plaire.
Le mari d'Emma ?tait un grand gaillard. Ses biceps ?taient plus gros que
le torse d'Hugo ou presque. C'?tait une montagne. Dans le 4x4 qui les
men?rent au fond des bois, il sentait la camaraderie, l'esprit de la
chasse, l'envahir. Oui, ils allaient courir au fond des bois pour courir
apr?s des sangliers! Le p?re leur avait dit d'?tre prudents, ? cause des
gardes. Mais les deux enfants semblaient ?tre au courant, Hugo en
conclut que ?a n'?tait pas la premi?re fois qu'ils chassaient ainsi.
L'attente dura des heures, dans la chaleur moite des bois. Jo lui
expliqua le maniement du fusil, comment viser, les pr?cautions ?
prendre, et lui fit tirer deux ou trois fois sur un arbre pour lui
apprendre.
Ce ne fut qu'? quatre heures de l'apr?s-midi, enfin, qu'un daim
consentit ? pointer le bout de son nez. Ce fut le p?re, bien entendu,
qui le toucha. Ils le suivirent, ensuite, pendant de longues minutes. La
b?te agonisait, au bord d'un chemin forestier. Les deux enfants ?taient
surexcit?s de le voir enfin.
?Donne lui le fusil papa, donne lui le fusil! Tu vas voir, c'est
g?nial!?
Mais il n'y avait rien de g?nial l?. La b?te respirait rapidement, d'un
souffle rauque, et son regard tremblait la peur et la mort. Il semblait
le regarder lui, l?, maintenant, ? jamais. Il ne put se r?soudre ?
appuyer sur la g?chette, et le p?re sortit son couteau pour finir le
travail proprement, pendant que les enfants attendaient dans la voiture.
?T'es qu'une tapette!? lui dit Jo.
?Mais c'?tait une gentille b?te!? r?pondit Hugo. Il se sentait idiot, de
sa petite voix.
?Mais c'?tait une gentille b?te?, mima d'une voix suraig?e JB. Oui,
c'?tait une gentille b?te, mais nous on va pouvoir manger de la viande,
et c'est pas avec le salaire que nous verse ta tante qu'on pourrait en
manger de la si bonne! Alors que toi, tu ne t'es jamais demand? d'o?
elle venait ta viande dans l'assiette? C'est parce que papa travaille
dur que tu peux la manger!
?Petite tapette! Petite tapette! Il pleure sa maman!? Rench?rit Jo.
?Arr?te, c'est qu'un m?me, il a 12 ans, laisse le, c'est bon.?, lui dit
son fr?re.
Il avait 13 ans. Pas 12!
Le p?re chargea la b?te ? l'arri?re, et, ? sa vue, Hugo fondit en larme.
Il se sentait d?bordant d'?motion, de tendresse, et de compassion envers
cette b?te dont il avait particip? bien malgr? lui ? la mort. Jo le
regardait d'un air m?chant. Personne ne dit rien dans la voiture retour.
Emma les attendait sur le perron de la ferme. Lorsqu'elle vit ses deux
enfants et Hugo qui pleurait, elle se pr?cipita vers lui pour le serrer
dans ses bras, et Hugo sentit le regard lourd des deux autres sur son
dos. Il aurait voulu ?tre n'importe o?, mais ailleurs.
*********
Le 20 juillet
Hugo grandissait, ces derniers temps, et avait toujours trop chaud. Tout
?tait parfaitement normal, selon Fran?oise, il commen?ait ? avoir l'?ge
de la pubert?. Apr?s son ?chec retentissant avec les enfants d'Emma, il
n'avait pas os? se frotter aux autres enfants de la ferme, ni filles, ni
gar?ons. Il restait de toute fa?on ? leurs yeux ?le fils de la
patronne?. A part deux autres petits de 3 et 7 ans, il ?tait trop jeune
pour les int?resser. Il restait donc souvent avec Emma, sa tante, son
chien, et parfois, il discutait avec des p?cheurs qui revenaient souvent
sur les berges. Il y avait notamment une jeune fille - Julia - qu'Hugo
appr?ciait, et dont il r?vait parfois la nuit.
Emma avait r?cup?r? un de ses jeans et l'avait donn? ? un autre couple
dont la m?re (de 3 filles, qu'il n'avait jamais r?ussi ? voir!) avait
coup? pour en faire un short. Il n'?tait pas totalement satisfait du
rendu, d'autant qu'il ?t? un peu serr? sur sa taille, mais il ?tait
confortable et il avait largement moins chaud qu'avec ses pantalons. Il
n'avait que peu d'affaires, et suite ? ?a Fran?oise se rendit compte
qu'il n'avait pas d'affaires d'?t? ? sa taille. Elle lui acheta de
nouveaux v?tements qui ?taient tout ? fait bien, m?me si au final il
n'avait pas grand monde ? qui les montrer.
JB ?tait assez grand pour aider son p?re ? la ferme l'?t?, mais Jo, lui
non. Il venait ainsi souvent pour emb?ter Hugo, d'une mani?re ou d'une
autre, pour lui pourrir la vie. Il ?tait jaloux de sa t?l?, de la
guitare ?lectrique, de tout ce qu'il n'avait pas et qu'Hugo avait.
Un soir, il le poursuivit dans le champ, et Hugo se blessa au talon,
derri?re la maison. En haut, la lumi?re ?tait allum?e. Il se cacha dans
l'ombre de la maison, et ?couta. Fran?oise semblait moins boire, ces
temps-ci. Elle ne l'avait plus frapp?. En fait, il ne la voyait que peu,
elle ?tait occup?e avec les autres fermes, et l'administration lui
prenait beaucoup de temps. Il ?tait en fait beaucoup livr? ? lui-m?me, ?
la lecture, ? l'ennui, ? nager dans la piscine et regarder la t?l?.
En haut, elle semblait parler toute seule. Hugo essaya de se hisser sur
la pointe des pieds pour poser le pied sur la margelle et, de l?, monter
sur le rebord de la fen?tre. La douleur du talon le lan?a, et, ? la
place il glissa dans un trou sous la fondation de la maison. Les
pierres, les toiles d'araign?e, la poussi?re, sa t?te cogna un meuble et
il se sentit assomm? un instant tandis que le bois pourri s'effondrait
sous lui.
En haut, il entendait toujours Jo qui l'appelait ?tapette, tapette?! Si
je te trouve je vais te tanner, tapette!?.
Hugo toussa ? plusieurs reprises. Il ?tait ?tourdi. Autour de lui, de
grandes armoires contenaient des dizaines de bouteilles de vin, et des
grands coffres, des jouets pour enfant en bas ?ge. Il ?tait dans la
cave. Cela faisait bien 10 minutes qu'il ?mergeait de son vertige.
Dans la cave. Il ?tait dans la cave.
Soudain, une lueur se fit dans sa t?te. La cave ?tait dans l'autre
partie de la maison!
Dehors, il entendit du remue-m?nage. Il fallait faire vite. Il rampa, le
long des remblais, toussant, expirant, ?cartant les araign?es, remontant
pierre apr?s pierre, les genoux en sang, jusqu'? l'ouverture, et de l?,
jusqu'au jardin.
Il ?tait en piteux ?tat. Ses cheveux ?taient agglutin?s de sang et
tombaient devant ses yeux, son nez et sur sa bouche. Il sentait le go?t
de poussi?re jusque dans sa gorge.
Face ? lui, ?Jo? qui riait aux ?clats.
Il avait perdu son short dans la chute, et il essayait maladroitement de
le remettre, pendant qu'il coin?ait au niveau de ses fesses. Son talon
le lan?ait horriblement.
?Ah ah ah! Ta-ppeeee-te, Ta-ppeeee-te! Tu t'es fait mal??
Il voulut se lever, mais sa douleur au talon fut trop grande. Jo
s'approcha de lui, et lui mit un coup de poing. Il tomba de nouveau par
terre. Il avait peur, ? pr?sent. Personne ne pourrait l'entendre, ici,
de l'autre c?t? de la demeure. Jo ?tait vraiment terrifiant, avec son
regard fou.
Derri?re, Fran?oise apparut soudain. Elle ?tait habill?e pour partir ?
cheval et il aper?ut derri?re elle sa monture. Sa cravache ? la main,
elle s'approcha de Jo, et le frappa violemment au visage.
Elle ?ructa ?TU NE TOUCHES PLUS JAMAIS A HUGO!?. Et le frappa, une,
deux, trois fois debout, puis couch?, sur le dos, les ?paules, la joue.
Il sanglotait bruyamment, et Emma accourut au loin.
?Alors, qui est la tapette, Jo? Hein? Tu veux que je te fasse le cucu
tout rouge, c'est ?a?? Elle accompagna ses derniers mots d'un nouveau
coup de cravache sur les fesses.
Emma se jeta entre son fils et Fran?oise. ?Monstre!?. Puis elle vit
Hugo, et elle regarda son fils. ?Monstre!? redit-elle, cette fois-ci ?
son attention. Elle prit la cravache des mains de Fran?oise et un ultime
coup siffla sur ses jambes.
*********
1er Ao?t
Sa convalescence dura presque 10 jours. Le talon ?tait le plus amoch?,
et il ne pouvait marcher qu'avec une attelle. Il resta dans une chambre,
dans la grande maison, afin de pouvoir recevoir tous les soins
n?cessaires, ? proximit? d'Emma, qui surveillait ?galement son fils, qui
d? venir lui pr?senter des excuses.
Hugo eut ? nouveau sa naus?e, rapidement, et devint d?sagr?able avec
tout le monde, y compris avec Emma. Il fut heureusement excus?, ?tant
donn? la douleur et ce qu'il avait subi.
Fran?oise ?tait particuli?rement curieuse des circonstances de son
accident. Il avait cherch? ? tout prix ? cacher qu'il ?tait tomb? dans
la cave, et pr?f?rait dire que Jo l'avait pouss?, afin de grandir son
statut de victime aupr?s des deux femmes, plut?t que de dire qu'il
s'?tait fait tout ?a tout seul en voulant ?couter ? la fen?tre.
- Hugo, c'?tait comment, dans le trou?
- H? bien, je suis juste tomb?, ma jambe s'est enfonc?e, et quand j'ai
voulu me remettre, tout mon corps s'est enfonc?. Heureusement que je ne
suis pas tomb?!
- Non, mais heureusement, oui. Si tu ?tais tomb?, il aurait fallu faire
b?tonner le trou!
- Non! Non, c'est idiot! J'ai juste gliss?, c'est tout!
- Mais tu as dit que c'?tait Jo qui t'avait pouss?!
- Oui, enfin, c'est pareil!
- NON, c'est pas pareil!
Il se sentait encore envie de pleurer. C'?tait insupportable qu'elle ne
soit pas de son c?t?!
- Bon, oui, j'ai juste gliss? en voulant le fuir, parce que j'avais
peur. Voil?.
- Mais tu ne veux pas que je le fasse renvoyer? Il sera tr?s bien en
pension, et ses parents sont pr?ts ? le faire tu sais!
Il ne voulait pas causer de chagrin ? Emma, qu'il aimait beaucoup.
- Non! Tu ne comprends rien!
- Mais qu'est-ce que tu as en ce moment! Tu veux que je te renvoie ? la
petite maison, c'est ?a?
- Non!
- Tu veux aller chez ta m?re?
- Non!
- MAIS ALORS TU VEUX QUOI?
- Non! Euh...Non, mais je veux juste que tu me laisses tranquille,
j'?touffe!
Elle s'approcha de lui, l'air mena?ant.
- Non! Piti?!
Elle arr?ta son bras.
- Bon, demain, tu viens avec moi, je t'am?ne je ne veux pas te laisser
seul, je dois faire le tour des autres fermes.
- Non!
- Ce n'est pas une question!
- Je veux pas!
Elle l?cha son bras et sa main siffla sur sa joue, tandis qu'Hugo ?mit
un petit g?missement, tandis qu'Hector se r?fugia un peu plus sous la
couverture.
- Ca te va comme argument? Tu viens!
Elle se dirigea vers la sortie, et, arriv?e au trois quart, tandis
qu'Hugo maugr?ait contre sa tyrannie, elle se retourna. Hugo avait des
envies de meurtre.
- Ah, et je vais t'amener chez le coiffeur, aussi, ?a fait des mois
maintenant que tu aurais d?, c'est trop long.
- Non!
- Non?
Sa moue ?trange et agac?e fut la derni?re chose que vit Hugo avant
qu'elle ne disparaisse dans l'ombre du couloir.
Le lendemain, Hugo dut prendre ses b?quilles, ravaler son honneur,
s'excuser, devant Fran?oise et le p?re de Jo, tout d'abord aupr?s d'Emma
pour avoir menti au sujet de Jo, puis s'excuser aupr?s de Jo d'avoir
menti ? son sujet.
Dans la voiture qui menait jusqu'au site agricole, Fran?oise lui fit la
le?on.
- Tu comprends pourquoi j'ai fait ?a?
- Non!
- Tu ne sais dire que non, depuis hier? Si j'ai fait ?a, c'est pour que
tout ceci ne se reproduise pas. Tu es fragile, tu n'es pas b?ti comme
eux. J'ai humili? Jo l'autre jour, mais je ne veux pas que ?a soit
injuste, car sinon ils se vengeront sur toi. Maintenant, ils n'oseront
plus te faire du mal, mais ils n'auront pas envie non plus de se venger.
- ...
- Bon, parlons d'autre chose. Ton corps change. Tu es en train de
devenir un grand maintenant. Je t'en ai parl? hier, mais si tu le
souhaites, je peux te ramener chez ta m?re. Tu es devenu tr?s calme,
avec le temps, et tu es bien plus doux que je n'osais l'esp?rer.
Au mot de ?doux?, Hugo se sentait plein de f?rocit?. Il ne voulait pas
?tre ?doux?.
- Arr?te de faire le fier ? bras! Tu sais que je peux te mater! ?coute-
moi! Tu apprends ? devenir un adolescent. J'aimerais que tu rencontres
des gens de ton ?ge, pour que tu puisses devenir sociable. Tu comprends?
J'aimerais que tu y r?fl?chisses d'ici au mois de septembre. Tu pourras
d?cider ? ce moment-l? de revenir chez ta m?re, ou bien de commencer
l'ann?e ici. Tu peux aller ? l'?cole d'ici avec les autres gar?ons, avec
le bus, mais je peux aussi continuer ? te faire la classe, cela a tr?s
bien r?ussi l'ann?e derni?re. C'est ? toi de prendre ces d?cisions.
- ...
- Ah, et aussi. Ne t'inqui?te pas si tu ne sembles pas grandir dans des
proportions anormales. C'est le cas de tous les adolescents.
Il n'avait jamais remarqu? qu'il ne grandissait pas ?normalement?. Il
devint tout rouge.
- Oh, arr?te! Enfin tu vois, tu grandis des jambes, mais pas encore du
torse, tu n'as pas encore mu?, enfin ces choses quoi. En tout cas tu es
tr?s bronz?, je suis s?r que la jeune fille des p?cheurs s'en est
aper?ue elle aussi.
S'il pensait ?tre rouge avant, ce ne fut rien compar? ? ce moment-l?. Il
se sentait nu.
Il d?cida de ne plus rien dire jusqu'? la fin de la journ?e. Mais il
rompit ses v?ux de silence au bout de 20 minutes.
Dans sa t?te, il n'attendait qu'une chose : enfin ?tre r?tabli pour
retourner dans la cave et explorer la maison interdite. Il pensait ? ?a,
jour et nuit. Le soir, il racontait son plan devant la photo de
Madeleine et Sophie, ses amies imaginaires. Il se sentait souvent triste
? l'id?e de ne pas les avoir rencontr?es, comme un deuil.
**********
Le 5 ao?t.
Il ?tait revenu dans sa maison. Le soir m?me, il regarda son corps
devant le miroir. Il ne comprenait pas la remarque de sa tante. Il ne
voyait rien de diff?rent, rien d'anormal. En m?me temps, quelle ?tait la
norme? Il ne connaissait personne de son ?ge. Depuis deux ou trois mois,
ses cheveux ?taient devenus plus gras. Mais c'?tait normal, para?t-il.
Et comme ils bouclaient beaucoup, ils retombaient franchement derri?re
sa t?te. Mais ?a n'?tait pas anormal. Il aurait surement d? aller les
couper depuis avril, ou m?me mars, m?me s'il les aimait bien long
habituellement, pour un gar?on. A mi-joue, plus ou moins. Mais, l?,
c'?tait un plus long, et p?nible, sauf parfois. Il verrait plus tard. Ce
n'?tait pas si g?nant. C'?tait un style.
Moins que ces pantalons. Il avait des pantalons qui le serrait, et il ne
pouvait plus enfiler son short en jean, qu'il enfilait non sans soucis
pourtant il y a encore quelques jours. Il avait remarqu? l'apparition
d'un fin duvet ? divers endroits, mais, comme il ?tait plut?t clair de
cheveux, ?a non plus, ?a n'?tait pas anormal. Mais alors quoi? Il
grandissait, c'est tout. Peut-?tre un peu trop de joues? Il aspira ses
joues de l'int?rieur pour se regarder, et il banda ses muscles face au
miroir. Il aurait un style.
*********
Le 10 ao?t.
C'?tait le jour J. M?me Hector ?tait tout excit?. Il avait pris sa
d?cision en faisant ses longueurs. Le matin il avait ?crit une lettre ?
sa m?re pour lui dire qu'il passait un tr?s bon ?t?, qu'il prenait du
bon air ici, et qu'il se sentait vraiment mieux dans sa t?te. C'?tait le
jour J, oui. Il avait emprunt? une lampe de poche, et une corde dans la
maison, et, le soir m?me, il pr?voyait l'exp?dition vers la cave. Il
savait que sa tante ne rentrerait pas avant le 12 ao?t, il pourrait donc
aller et venir dans la maison sans ?tre vu ni craindre quoique ce soit.
La journ?e s'?coula, lentement, entre l'attente, surveiller si la jolie
Julia passait ici, r?p?ter les diff?rentes ?tapes, v?rifier la liste des
affaires, jouer avec Hector, puis recommencer.
Enfin, le soleil amor?a son d?clin et vint la nuit salvatrice.
Vers 22h30, Hugo attacha Hector ? sa niche (hors de question de se faire
pincer ? cause de lui comme la derni?re fois!), marcha d'un air innocent
jusqu'au bord de l'arri?re de la maison, attrapa les affaires laiss?es
dans les plantes grimpantes, les mit dans un grand sac qu'il descendit
au bout de la corde, puis qu'il attacha ? un pic en fer contre le mur
porteur de la maison, et qui se trouvait l? surement depuis bien avant
sa naissance.
La seconde descente s'av?ra plus plaisante que la premi?re. La plupart
des toiles et des pierres avaient ?t? d?gag?es par sa premi?re chute, et
il arriva sans encombre dans la cave poussi?reuse. Il alluma sa lampe-
torche. Il y avait un grand nombre d'affaires, v?tements pour b?b?,
jouets pour enfant, un landau, une poussette, des parapluies, une grande
armoire. Mais rien d'int?ressant. Il essaya de tourner le loquet de la
porte de la cave. Ferm?e.
Hugo enragea. Bloqu?, ici, apr?s tous ces mois ? tourner ? chercher!
Rien!
Il fit plusieurs fois le tour de la cave, retint son souffle et sa lampe
lorsqu'il entendit des voix devant la bouche de la cave. En inspectant
la porte, il se rendit compte qu'il y avait une large ouverture dessous.
En se glissant, il pourrait facilement passer.
Il se mit ? genoux, sortit sa couverture (pr?voyant, le Hugo, pensa
t'il!), et rampa sous la porte. Au moment de passer, son post?rieur
bloqua. Il s'agrippa au rebord de la marche, de l'autre c?t?, puis, au
bout d'un long moment, il parvint ? passer.
?Ouf! Prochaine fois, r?gime!?
De l'autre c?t?, il y avait la clef sur la porte. Il d?bloqua la
serrure. Avec de la chance, si sa tante ne venait pas souvent -et vu la
quantit? de poussi?re sur les bouteilles, elle ne devait pas se servir ?
cet endroit!- il serait dor?navant tranquille. Il enfila ensuite ses
chaussons, et traversa la maison. Il avait constitu? un plan, notant les
fen?tres, et avait conclu que le plus int?ressant devait se situer au
1er et 2?me ?tage. La cave, ?trangement, ne communiquait qu'avec une
toute petite cuisine abandonn?e du rez-de-chauss?e, dont les portes
?taient toutes condamn?es, Fran?oise lui pr?f?rant la grande cuisine sur
l'autre aile.
Il prit le petit escalier, lentement, regardant chaque parcelle de mur.
Il se sentait surexcit?, comme un explorateur d?couvrant la tombe d'un
Pharaon, comme un aventurier au Nouveau Monde! Sur son plan, il nota au
fur et ? mesure ?Cuisine?, ?couloir?, et ouvrit la premi?re pi?ce.
C'?tait la chambre du couple.
Tous les meubles ?taient, l? encore, tendus de drap blanc. Il
connaissait cette pi?ce. C'?tait celle o? il avait vu sa tante, au d?but
de l'?t?.
A c?t? de lui, la pi?ce d'entr?e o? il avait vol? la photo. Il reprit le
couloir et le relia ? ?vestibule? et ?chambre Fran?oise? qu'il avait
d?j? not?.
Il restait 4 portes, 5, 6!
Il y avait : une salle de bain, des toilettes et une grande salle ?
manger qui prenait 2 portes pour elle. Puis, ce qui int?ressait le plus
Hugo, les chambres d'enfants. Elles ?taient petites (toute proportions
gard?es), et au bout d'un petit couloir qui servait d'insonorisation
avec le reste de la maison. Rien d'int?ressant. Il y avait quelques
photos, mais la plupart avaient jauni. On reconnaissait Madeleine avec
Sophie, ? la plage, ? la piscine, ? la danse, avec des amies. Elles
paraissaient tr?s jolies et tr?s famili?res sur les photos. Il y avait
aussi une photo de lui, petit, ? 4 ans, avec toute la famille, ses
cousines, les deux fr?res et les deux s?urs constituant ses parents, son
oncle et sa tante. Il sentit un sanglot lui monter, lui seul n'ayant pas
v?cu -puisque sans souvenir - cette sc?ne heureuse de leur vie. Il
renifla un bon coup. ?Marre de chialer comme une gonzesse?, essayant de
mimer en chuchotant la voix de basse de JB.
Il collecta quelques photos int?ressantes. Rien non plus d'int?ressant
dans la chambre de Sophie, quelques affiches et un drapeau punais?. Une
chambre d'adolescente. On voyait que le m?nage avait ?t? fait r?cemment
dans toutes les pi?ces, que les draps ?taient chang?s. Pourtant, cette
pi?ce manquait d?sesp?r?ment de vie. O? ?taient les jouets, o? ?taient
les v?tements? Est-ce qu'on ne jouait plus ? 17 ans?
Au bout du couloir, il y avait une 7?me porte. Hugo s'approcha en
tremblant, et les gonds ?mirent un long grincement donnant sur un
rectangle noir.
?Oulha, il va falloir huiler tout ?a, Mme ma Tante!?.
Devant lui, un escalier. Bien s?r, le 2?me ?tage!
Il grimpa les marches 4 ? 4, ou plut?t 3 par 3, sa taille restant
modeste et sa douleur au talon forte.
En haut, il y avait ? nouveau 4 portes. Chacune des portes ?tait comme
une promesse, pour lui.
Les pi?ces ?taient les bureaux et pi?ces respectives de chacun des
membres de la famille. Elles ?taient immenses, plus grandes que sa
maison, chacune. Le bureau de Bernard ?tait manifestement l? o?
Fran?oise venait travailler parfois, car il y voyait r?guli?rement de la
lumi?re. On voyait des documents rang?s, appartenant ? lui, et ? elle.
Il y avait quelques photos, mais, globalement, la pi?ce respirait le
s?rieux d'un homme d'affaire affair? ? ses affaires affairantes.
La pi?ce d'en face, de Fran?oise, contenait un piano. Comment penser
qu'elle avait pu jouer du piano? Sur des photos au mur, on la voyait
pourtant, notamment, dans une salle de concert. Elle avait donn? des
concerts! Hugo n'en revenait pas. On la voyait ?galement devant un
ballet, ses deux filles habill?es pour le gala. Il y avait plein
d'affaires pour le sport. Sur les photos, Fran?oise ?tait une belle
femme et f?minine, m?me lorsqu'elle se trouvait sur les photos avec ses
classes, comme institutrice. Hugo ?tait abasourdi par tout ?a, et notait
fr?n?tiquement chacun des d?tails.
Il se dirigea ensuite avec une excitation mal contr?l?e vers les deux
pi?ces du fond.
La pi?ce de gauche ?tait une petite salle de danse, remplie de miroir.
Une armoire contenait tout le mat?riel de danse. Il y avait aussi, sur
les autres murs, des dizaines et des dizaines de rayons de livres, une
immense biblioth?que. C'?tait incroyable.
L'ultime pi?ce, qui fit ouvrir la bouche d'Hugo, de surprise, c'?tait le
dressing des deux filles. La pi?ce ?tait divis?e en deux parties, dont
l'acc?s se faisait par une porte basse, et ?tait remplie, du sol au
plafond, de v?tements f?minins. Il y avait aussi des montagnes de
chaussures. C'?tait la caverne d'Ali baba, la chambre du tr?ne.
C'?tait ?a que Fran?oise cachait, donc. Sa vie d'avant, intacte, laiss?e
telle quelle derri?re des chaines.
Une fois encore, Hugo se sentit des larmes couler sur ses joues,
d'?motion. Il resta l?, assis, dans le dressing de sa cousine d?c?d?e.
Sur le seul mur vierge, des photos allaient du sol au plafond, d'elles,
un peu partout. Elles ?taient vraiment magnifiques, tr?s bien habill?es,
on sentait que cette famille ?tait vraiment fortun?e.
Comment Fran?oise avait pu devenir cette femme grise et r?che, en
quelques ann?es? Il se sentait horriblement triste, d?sol? et ne cessait
de pleurer, secou?. Il n'avait jamais consid?r? que Fran?oise f?t aussi
un ?tre humain avec ses peines. Il se sentait honteux pour tout le mal
qu'il avait pu lui faire. Il avait envie de tendresse, et cesser toute
cette violence.
Au bout d'un long moment ? tourner regarder et fouiller, il constata
qu'? peu de choses pr?s, Madeleine faisait la m?me taille que lui. Il
fut pris de l'envie irr?pressible d'essayer un v?tement. Dans le noir,
ses cheveux d?tach?s devant son visage, il pourrait passer pour sa
cousine, peut-?tre?
Il d?tacha ses cheveux, qui se lib?r?rent jusqu'au bas de son menton.
Ses jolies boucles dor?es ?taient en train de devenir un probl?me. Mais
sa fiert? mal plac?e faisait qu'? pr?sent, c'?tait ? lui d'aller
supplier Fran?oise de l'y amener, chez le coiffeur. Hors de question de
lui demander quoique ce soit! Plut?t mourir! Il savait qu'elle
remarquait chaque mouvement rageur de sa part, et qu'elle attendait le
moment o? il c?derait. Jamais il ne lui ferait ce plaisir. En tout cas,
jamais jusqu'? ce qu'il en ai suffisamment marre.
Sentant revenir un peu de son honneur, il renifla un bon coup ses
larmes. Il se d?shabilla, et dans la tr?s grande chaleur de l'?t?, il se
balada nu dans la douceur des v?tements rang?s, du temps arr?t?.
Il prit une petite culotte, blanche, toute simple, et l'enfila. Le
contact ?tait tr?s doux, la taille ?tait ok, les fesses au bon endroit.
C'?tait pas mal. Il chercha des chaussettes, mais il vit que Madeleine
portait surtout des collants, ou des bas, en toutes mati?res. Il finit
cependant par trouver un grand stock de petites socquettes blanches qui
ne couvraient pas tout le payer, ce qui n'?tait pas tr?s agr?able. ?Bon,
passons ? la suite! Je suis fatigu?!? dit-il tout haut.
Trouver un bas ?tait plus compliqu?. Il y avait v?ritablement une
montagne de v?tements, il semblait qu'il y avait toutes les couleurs,
toutes les tailles, toutes les formes. Cependant, Madeleine semblait
surtout porter des robes, un grand nombre de jupes, aussi, et des
shorts. Il ne put trouver en tout qu'une dizaine ou une quinzaine de
pantalons, ce qui ?tait plus que ce que poss?dait Hugo, mais vraiment
une faible proportion. Il essaya un short en jean, tr?s semblable ?
celui qu'il portait jusqu'alors. Il lui sembla beaucoup plus large au
niveau des fesses que le sien, assez seyant, aussi, et il ?tait
l?g?rement plus court, ? mi-cuisse. Il poss?dait ?galement une ceinture,
ce qui ?tait bien pratique. Il d?cida de le conserver. Il continua en
recherchant un haut. Madeleine devait d?j? ?tre form?e, il vit des
soutiens-gorge r?cents et des brassi?res plus anciennes.
Les hauts ?taient plus probl?matiques. Ils ?taient tous vraiment
f?minins, soit dans les motifs, soit dans la forme, la coupe. Il prit un
haut neutre, blanc, l?g?rement moulant, tr?s l?ger. Il se sentait bien,
dans la chaleur de la pi?ce. Il regarda par la petite fen?tre, dehors,
tout ?tait paisible. Sur le mur du fond, il y avait une double porte
roulante, qui ouvrait sur un cabinet, encastr? dans le dressing en U,
surmont? d'un miroir et ? c?t? d'un petit frigo. ?Un frigo?? se demanda
Hugo.
A l'int?rieur du frigo, il fut encore une fois stup?fait. Celui-ci ?tait
rempli de maquillage, vernis, poudres diverses, tubes de rouge ? l?vre.
Au-dessus, dans un petit meuble ? tiroir, pinces, brosses, ?pingles,
b?tons de m?tal, en tout genre. Il y avait une affiche au fond, entre
deux jupes longues noires. ?Reine de beaut? - Concours 2009?. On voyait
les deux s?urs, par?es de leurs plus belles robes, au milieu d'autres
filles. La plus grande ?tait vraiment canon, on aurait dit une adulte,
tr?s bien form?e, tr?s sexy. Mais Madeleine...Hugo aurait volontiers aim?
une fille comme ?a, m?me si elle avait 2 ans de plus que lui sur la
photo. Cette photo avait ?t? prise peu avant l'accident. Il y avait eu
probablement d'autres photos avant. Encore au-dessus, sur le bois du
meuble, une inscription ?Tu seras Reine, ma s?ur!?.
Il se regarda dans le miroir. Dans le clair de lune de la fen?tre, et
l'ombre port?e par la torche par terre, ils se ressemblaient, un peu.
Surtout ce visage, plein, aux yeux verts, encadr? par ces cheveux dor?s
en zigzag.
Sous la petite table, du miroir, il y avait un petit coffre, contenant
une dizaine de livres de mode, de maquillage, de toute sorte, et des
magazines f?minins, tr?s nombreux, empil?s.
Dire que c'?tait seulement le dressing d'une des deux filles!
Il enleva le short, et le mit dans son sac. Il enfila l'ancien, et
constata des griffures sur ses hanches l? o? le v?tement l'irritait. Il
prit sa hanche dans ses doigts sur la trace, et constata qu'elle ?tait
gonfl?e ? cet endroit. Il fit le tour de sa hanche avec son doigt, et
constata qu'elle est un peu molle, tout du long. C'?tait bizarre. Il
n'?tait vraiment pas gros, pour autant, mais ses hanches ?taient
l?g?rement gonfl?es, un peu grasses, de chaque c?t?. La griffure, par
contre, ?tait vraiment tr?s irritante. Tandis qu'il enlevait ? nouveau
le short de Madeleine, pourtant plus agr?able, il se remit ? chercher
dans les affaires.
?'l a du fric, le M'sieur Bernard!? se dit-il en marchant.
Le parquet craqua derri?re lui. En se retournant soudainement, Hugo fit
tomber 3 cintres de leur barre. Ce n'?tait rien. Il souffla un grand
coup. Deux robes, et une jupe. ? Pourquoi pas deux jupes et une robe,
pour changer, non?? murmura-t-il en riant doucement. La jupe ?tait ?
volants, au genou, et sombre, une jupe d'?t? habill?e. Assez simple.
?Pourquoi pas, au final??, murmura-t-il.
Il enleva son bas, et enfila la jupe. Elle ?tait tr?s l?g?re. C'?tait
comme ?tre nu dans de la gaze. Aucun frottement d?sagr?able sur sa
hanche, et la jupe le tenait bien gr?ce ? une mini ceinture sur sa
taille. Ce n'?tait pas chaud comme ses shorts!
Les chaussures occupaient presque un m?tre vingt de hauteur, tout autour
du dressing. L? encore, il y avait de tout. ?Mais avec quoi se
promenait elle dans la ferme??, se demanda Hugo avant de remarquer des
petites bottes en caoutchouc ? fleurs, portant encore quelques vieilles
traces de terre coll?e.
Il se mit ? sauter (sur le talon en bonne sant?, toutefois) et faire
voler sa jupe autour de lui. C'?tait tellement amusant! Il cherchait des
chaussures mignonnes, pour aller avec son short, ou sa jupe. Mais tout
lui paraissait importable, ou trop habill?. Il fixa son choix sur des
tennis blancs, qu'il aurait pu aussi bien porter lui. En se regardant
dans la glace, il vit qu'il n'?tait pas tr?s bien assorti ; mais ?a
n'?tait pas grave, il ?tait heureux. Il prit la grosse brosse en bois
(Madeleine avait les m?mes cheveux que lui, boucl?s et ?pais), et frotta
?nergiquement ses boucles. C'?tait mieux. Comment faisait-elle pour
avoir les cheveux presque lisses, avec ses boucles magnifiques, et bien
tenues, sur les photos? En se penchant sur le miroir, il vit sur la
pile un livre sur les coiffures et le lissage. Il d?cida de l'emprunter,
?galement. Il ramassa ?galement une pince ? cheveux.
Ainsi arm? de ses tr?sors, il rangea toutes ses affaires, et entama la
retraite vers sa maison. Il avait pass? presque une heure et demie dans
ce palais des merveilles. Il fallait absolument qu'il revienne!
Il descendit les escaliers doucement, et arriv? en bas, il s'aper?u
qu'il avait toujours sa jupe, son haut et ses tennis et qu'il avait
rang? ses affaires dans son sac ? la place.
Il h?sita un instant et puis tourna la poign?e ?Allez, on y va! Soyons
fous!? Il se sentait tr?s excit?.
Les tennis de Madeleine ?taient vraiment pratiques, ils accrochaient
mieux que ses sandales, et il put remonter sans accroc. Il ?tait
notamment inquiet pour la jupe qui aurait pu s'accrocher contre les
pierres. Avant de monter, il prit la pince et s'attacha les cheveux en
un chignon pour ne pas les avoir dans les yeux. Arriv? en haut, il
parcourut les quelques centaines de m?tre du sentier dans un ?tat second
; il sentait l'air chaud entrer sous sa jupe et la faire voleter au gr?
du vent.
Arriv? chez lui, il plia soigneusement le haut, la jupe la pince et le
livre, et les rangea dans son coin secret bloqu? sous l'escalier, dans
une boite. A la place, il enfila le short en jean de Madeleine, un t-
shirt, et d?cida d'aller se promener ? l'entr?e principale. M?me ?
minuit, il y avait toujours des gens en ?t?, la nuit ?tait un peu
festive. Il discuta quelques temps avec JB, Jo, Emma, et m?me une des
filles plus ?g?es que lui dont il oublia le nom. Personne ne semblait se
rendre compte qu'il portait la petite culotte de sa cousine, ni que
c'?tait son short. Seule Emma lui demanda comment il avait fait pour le
nettoyer (il ?tait rest? tr?s sale depuis sa chute). Il mentit quelque
chose, et elle lui dit qu'en tout cas, il lui allait tr?s bien,
maintenant!
*********
Le 11 ao?t.
Hugo ?tait un gar?on organis?. Jamais, pour autant, il n'avait eu les
id?es aussi claires. Il fallait qu'il y retourne. Il fallait. Il lui
restait tellement ? d?couvrir! Et que dire de l'autre dressing? Il
faisait, ce jour-l?, horriblement chaud. Il sentait sa t?te tourner,
tout le temps. Ce n'?tait pas d?sagr?able, en fait, il se sentait un peu
flotter. Son esprit, bien qu'assez embrum?, ?tait enti?rement occup? ?
ce qu'il devait faire, comment y retourner. Mais pourquoi faire? C'?tait
une exp?rience amusante, mais, concr?tement, ?a n'apportait pas grand-
chose. Mais il fallait qu'il y retourne. C'?tait ses cousines, qui
vivaient l?-bas. Il voulait les conna?tre plus.
Il parcourut le livre dans la journ?e, et prit quelques notes
mentalement sur ce qu'il devait faire. Il avait remarqu? la pr?sence de
b?tons en m?tal, qui devaient ?tre les fers dont parlait le livre. Ce
soir, il faudrait qu'il essaye. Ce pourrait ?tre amusant! Dehors, Hector
tirait la langue et prenait le frais. Hugo sortit promener son chien, le
long de la rivi?re, pieds nus dans l'eau. Julia lui fit un coucou. Il
lui fit un grand sourire, et lan?a la conversation, par l'eau
interpos?e. Il se sentait courageux. Elle avait presque son ?ge. Il se
sentait ? l'?troit dans son short, lorsqu'il ?tait excit?. Le short de
Madeleine n'?tait manifestement pas pr?vu pour ?a, c'?tait son seul
d?faut compar? au sien. Ceci dit, il n'?tait pas tr?s int?ress? pour le
moment par le sexe et il ?tait rare qu'il se manifeste ainsi. La
derni?re fois qu'il a eu de grands troubles, c'?tait lorsqu'il est rest?
coinc? pendant une semaine ? la ferme au moment de l'accident. Il
passait sa journ?e ? essayer de se masturber pour se soulager, tellement
il ?tait excit? ? l'id?e d'enfin explorer la maison. Enfin, c'est ce
qu'il en avait conclu.
Julia ?tait une fille ?tonnante. Elle ?tait intelligente. Elle
comprenait tout ce qu'il disait du premier coup, et m?me ce qu'il ne
disait pas. C'?tait vraiment un ph?nom?ne. Il ?tait un peu amoureux
d'elle.
Au soir, il reprit toutes les affaires, et le chemin de l'exploration.
Il ?emprunta?, au passage une bouteille de vin dans la cave, et vit
?Sauternes 1987?. ?a avait l'air d'?tre quelque chose! L'?tiquette ?tait
? peine lisible, mais il se dit qu'il allait essayer, apr?s tout. Une
fois pass? la porte, il ouvrit religieusement son sac, enleva ses
v?tements, et enfila ? la place la jupe ? volants, la culotte, et ses
petits tennis. Il grimpa les escaliers jusqu'en haut, en ?coutant le
bruit de ses semelles sur l'escalier, comme devait le faire Madeleine
avant.
Il s'installa ensuite, devant le miroir, et commen?a ? brosser ses
cheveux. Il brancha le fer (miracle, il y a encore l'?lectricit?!) et en
profita pour brancher la petite lampe du miroir, plus pratique que la
torche et le clair de lune!
Il essaya de faire comme le livre lui dit, et, apr?s s'?tre br?l? les
doigts, arriva ? un r?sultat semi-convenable. Ses cheveux ?taient un peu
moins ?pais, et de fait, ils ?taient beaucoup plus longs ? pr?sent.
C'?tait vraiment pas mal. Il ajouta un peu de produit de laque qui le
fit ?ternuer. C'?tait vraiment mieux, m?me si cela collait partout sur
ses doigts.
Une fois ceci fait, il se rendit dans l'autre dressing, de Sophie.
Sophie ?tait manifestement bien plus ?g?e. Ses soutien-gorge ?taient
pleins, ses jupes courtes. Ses chaussures ?taient aussi bien plus
hautes, plus de talons, de bottines, de bottes. Mais l?, ?galement, que
d'affaires! Le frigo ?tait ?galement plein de maquillage, mais Hugo
n'aurait pas su faire la diff?rence entre les deux. Il se sentait de
toute fa?on bien mieux avec Madeleine.
Il remit la jupe en tulle ? sa place, la culotte, et partit ? la
recherche d'une nouvelle ?tenue? pour la soir?e.
Il prit une robe noire, simple, et sentit la douceur du tissu
l'envelopper compl?tement. Il s'assit, ensuite, attacha ses cheveux
enfin assagis, et sortit son tire-bouchon. Il allait go?ter ce fameux
nectar, relique d'une ?poque heureuse!
Le vin, depuis longtemps mad?ris?, lui parut succulent. Il ?tait plein
de sucre, et l'alcool ?tait bien affaibli. Pourtant, apr?s 3 verres,
Hugo ?tait ivre. Il se leva, reposa avec s?r?nit? les tennis dans leur
boite, et sortit les talons noirs de la boite d'? c?t?.
?Mais qui voil?, madame la Marquise!? dit-il en riant stupidement.
Sur les (petits) talons, il se sentait ? l'?quilibre. Ou en ?quilibre.
Que manquait-il ? sa panoplie? Il ajouta une ceinture, enfila un
soutien-gorge qui baillait, et barbouilla ses l?vres d'un gloss rose
p?le.
Puis, prenant un dernier verre, il contempla la vue des champs, au clair
de lune.
C'?tait la vie r?v?e. Un tr?sor secret, partout, pour lui. Un secret.
Il passa un moment ensuite ? s'entra?ner ? marcher en ligne droite avec
ses talons, l'alcool n'aidant pas, il manqua de s'?taler ? plusieurs
reprises. Puis, il rangea toutes les affaires, r?emprunta la jupe ?
volants - d?cid?ment plus pratique pour trainer ? la maison que la robe
noire de soir?e -les tennis et le short. Il fit un d?tour par la salle
de danse, et s'observa ? nouveau, nu, face au miroir.
Il avait tr?s chaud, ? cause de l'alcool, et sa vue tanguait un peu.
Il toucha le bord de ses hanches. Il y avait bien l? un peu de gras. Il
y avait un peu de gras aussi sur les cuisses. Il remarqua de fines
z?brures sur l'int?rieur de sa cuisse et ? l'arri?re l? sur le dessous
de la fesse o? son pr?c?d